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Dans la matinée du samedi 24 janvier, 5.000 à 6.000 personnes, les élus du Trégor - et même au-delà - en tête, ont répété leur opposition au projet d'extraction de sable coquillier en baie de Lannion (Côtes d'Armor). La baisse des volumes et de la durée d'extraction proposée, la veille, par la Compagnie armoricaine de navigation n'a en rien entamé la détermination des manifestants.

« Qui vole le sable récolte la tempête ». Cette pancarte, parmi des dizaines d'autres déployées, hier matin, sur le quai d'Aiguillon, à Lannion, illustre l'exaspération qui a saisi le Peuple des dunes, ce collectif réunissant pêcheurs, professionnels du tourisme, des loisirs, défenseurs de l'environnement ou simples Trégorrois amoureux de leur cadre de vie, tous soutenus par l'ensemble des élus du secteur. Cinq ans après les prémices du projet présenté par la Compagnie armoricaine de navigation (Can), trois ans après une première manifestation de grande ampleur à Trébeurden (22), ils n'ont jamais changé d'avis. L'extraction de sable, ils n'en veulent pas en baie de Lannion. Les orateurs qui se sont succédé à la tribune avant de défiler en ville, ont égrené, une énième fois, les arguments qui nourrissent leur opposition : menaces écologiques qui pèsent sur cette dune située à 6 km de Trébeurden, entre deux zones Natura 2000 et à proximité de la réserve naturelle des Sept-Îles; crainte d'une érosion accrue du trait de côte; risque pour l'économie du territoire, de la plongée au nautisme, en passant évidemment par la pêche, cette dune étant « le garde-manger » du bar, poisson friand des lançons qu'elle abrite.

« Nos emplois valent ceux des marchands de sable ! »

« Il n'a été fait aucune étude des conflits d'usage économiques », s'est offusquée Corinne Erhel, députée socialiste de la circonscription de Lannion. Philippe Priser, pêcheur de Trébeurden, a enfoncé le clou : « Nos emplois valent bien ceux des marchands de sable ! (...) La mer, il ne faut pas la privatiser, la mer est à tout le monde », s'est-il exclamé, en rappelant que 34 bateaux travaillent sur ce site, soit 75 personnes embarquées. Toutes activités confondues, les opposants estiment que 150 emplois directs et 500 emplois induits seraient menacés. Les suppressions d'emplois mises sur l'autre plateau de la balance par la Can, basée à Pontrieux (22), ne pèsent pas aussi lourd à leurs yeux. « La Can appartient au groupe Roullier, 3,1 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 7.000 personnes à travers le monde. Je crois que ce groupe peut résister à un refus et rechercher d'autres solutions en mer, plus au large ou sur terre, dans des carrières calcaires », a souligné Joël Le Jeune, maire PS de Trédrez-Locquémeau (22) et président de Lannion Trégor Communauté. La révision à la baisse des prétentions de la Can (250.000  m³ sur 15 ans, au lieu de 400.000 m³ sur 20 ans) n'a pas davantage infléchi leur position. « Si l'extraction est diminuée de plus de 60 %, cela voudrait dire que le projet initial était totalement surévalué. Comment voulez-vous faire confiance ? », s'est interrogée Corinne Erhel. « Pour moi, la rupture est consommée, parce que le pétitionnaire n'a pas fait l'effort dès le début d'engager un véritable dialogue avec les parties prenantes, qu'il n'a jamais proposé d'examiner des solutions alternatives ». Si les Trégorrois comptent bien participer à la nouvelle table ronde promise par le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, dans le courant du mois de février, ce n'est pas pour accepter un compromis. « On dit que le barrage de Sivens ou l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il faut les faire parce que les élus sont pour ; là, tout le monde est contre le projet d'extraction mais on le ferait quand même ? », a feint de s'étonner Alain Bidal, le président du Peuple des dunes.

« M. le ministre ne signez pas ce truc »

« Nous ne plierons pas », a appuyé Joël Le Jeune, rejoint par Paul Le Bihan, le maire PS de Lannion, qui en a appelé à respecter la démocratie et l'intérêt général. « Cela fait quatre ans qu'on essaie de discuter gentiment mais la colère monte », a prévenu plus brutalement Philippe Priser, sans craindre de promettre des « actions hors-la-loi pour se faire entendre ». Avant le défilé dans le centre-ville de Lannion, Alain Bidal a conclu par un cri du coeur : « M. le ministre, ne signez pas ce truc ! »Un article de la rédaction du Télégramme

Voir le dossier complet sur le projet sablier réalisé par la rédaction du Télégramme

 

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