« Lancer une activité ici, au bout du monde ? Franchement, nous n'aurions jamais osé le rêver ». À deux pas du grand phare de Sein, Patrick Plan, pionnier de la culture d'algues en Europe à Lesconil avec sa compagne, Marie-Dominique, ne cache pas son enthousiasme. Sa société de recherche et développement Meristème est, depuis le mois dernier, locataire de l'ancienne écloserie à homards de l'île. Ce site, inexploité depuis une quinzaine d'années, pompe une eau de mer d'une grande qualité.
En quête de matière première
L'idée est d'y lancer la culture d'algues à terre au sein d'une ferme, une culture raisonnée avec l'objectif d'impact zéro sur le milieu. Une opération pilote qui sera lancée ces prochains mois et qui dessine l'aquaculture de demain. « Nous sommes producteurs et transformateurs depuis 22 ans. Or, aujourd'hui la matière première n'est plus suffisante : nous cherchons de nouvelles solutions de culture à terre et cette opportunité inespérée s'est offerte à nous », explique Patrick Plan. Les élus locaux ont joué les facilitateurs, ravis de voir l'île accueillir une activité supplémentaire. Et porteuse de sens, en plein Parc marin d'Iroise et sur un bout de terre où le flan au « lichon », petite algue récoltée par les femmes, est une tradition. Pour concrétiser leur projet, Marie-Dominique et Patrick Plan se sont appuyés sur les compétences des spécialistes mondiaux : les Japonais. Leur pays consomme deux millions de tonnes d'algues par an, contre 1.500 tonnes en France... Intéressés par l'initiative, Yoichi Sato et M. Ito, deux docteurs en biologie marine oeuvrant pour un grand groupe, se sont rendus, hier, sur l'île de Sein. « Ils réalisent un audit qui va nous aider à déterminer si l'emplacement et l'eau conviennent, quelles espèces se plaisent ici et donc lesquelles choisir... Il faut parfois faire appel à ceux qui ont le savoir-faire », résument les deux Bigoudens. Le début d'un partenariat ? Il est trop tôt pour le dire.
Nourrir l'île et la planète
En tout cas, l'île se plaît déjà à imaginer ces algues alimentaires 100 % sénanes. Les utiliser pour le pain, les plats de poisson, sensibiliser l'école à cette culture... Les spécialistes voient plus loin. L'Exposition universelle de Milan a pour thème l'alimentation de demain, avec les insectes et les algues en vedette, et le développement commercial lié aux pratiques « vegan » ou sans gluten est rapide. « C'est dans ce contexte que la communauté est très curieuse de ce qui se passe à Sein : Allemands, Américains ou Anglais veulent en savoir plus », ajoute Marie-Dominique Plan, qui se prépare à accueillir un autre groupe de scientifiques étrangers début juillet.
Un article de la rédaction du Télégramme