Avec son design futuriste, la maquette de NepTech qui sillonnait le bassin du parc expo pendant le dernier salon Seanergy, à Nantes, n’est pas passée inaperçue. Ce démonstrateur à l’échelle 1/7e d’une navette à passagers de 18 mètres préfigure la gamme de navires électriques (avant de passer à l’hydrogène) que veut commercialiser la start-up aixoise.
NepTech a été fondée en mai 2020 par trois associés : Tanguy Goetz (CEO, ancien de chez Airbus et Safran), Corentin Bigot (architecte naval ayant conçu une vingtaine de catamarans à moteur en Nouvelle-Calédonie) et Clément Rousset (ingénieur naval, ancien de chez TechnipFMC et de la DGA). « Nous avions envie d’apporter une brique d’innovation pour décarboner le monde maritime et fluvial. Nous nous sommes dits que le segment de marché de navires de 12 à 24 mètres, c’est-à-dire des navires de transport de marchandises ou à passagers de faible capacité, pouvait être décarboné dès à présent avec des technologies matures de batteries et piles à combustible », explique Clément Rousset à Mer et Marine. Alors que de nombreux projets autour de propulsions à hydrogène émergent, il estime qu’« il y a de la place pour tout le monde : le marché, c’est tout le remplacement de la flotte existante ». Pour se faire un nom, la start-up mise sur son « agilité et les innovations développées en interne » pour rendre ses navires « encore plus performants que ceux de la concurrence ».
Catamarans
Après avoir défini son business model, la jeune société, âgée d’un an et demi et qui compte aujourd’hui cinq personnes, a réalisé un travail de R&D avec de la simulation numérique, CFD et CAO, pour valider ses innovations. Elle a ensuite construit son premier démonstrateur à échelle réduite en juin dernier, construit en fibre de lin et infusion de résine epoxy biosourcée, pour tester les développements et innovations qui permettent, selon l’entreprise, de diminuer de 35% la consommation par rapport à un catamaran à masse égale.
NepTech a adopté une « approche inspirée de l’automobile », explique Clément Rousset, afin de « mutualiser les développements » et proposer du « semi-mesure ». L’entreprise a conçu quatre modèles : NepShuttle (navette maritime à passagers), NepRiver (navire à passagers fluvial), NepCargo (navire de transport de marchandises) et NepFerry (passeur). Mais ils adoptent un « châssis » commun, à savoir une plateforme de catamaran avec l’intégration de systèmes de propulsion électrique et batteries similaires.

Le NepCargo. (© NEPTECH)

Le NepShuttle. (© NEPTECH)

Le NepRiver. (© NEPTECH)
Innovations
Côté innovation, NepTech a travaillé sur les performances de ses navires qui seront construits en matériaux composites ou en aluminium. « A puissance égale, une propulsion électro-hydrogène, c’est-à-dire avec un réservoir, un système de pile à combustible, des batteries et moteurs, est trois à quatre fois plus lourde que des propulsions au diesel », selon Clément Rousset. « On dégrade donc fortement les performances du navire en termes d’autonomie ou de vitesse ». Pour faire chuter la consommation, NepTech a donc cherché à réduire la traînée hydrodynamique et à améliorer l’efficacité énergétique.

Le démonstrateur à échelle réduite. (© NEPTECH)
Tout d’abord, la carène a été optimisée pour freiner le moins possible. Mais l’entreprise a aussi conçu des foils spécifiques pour ses modèles atteignant des vitesses de l’ordre de 10 à 15 nœuds. S’ils ne sortent pas totalement la coque du navire de l’eau, ils permettent de diminuer la surface mouillée « de 50 à 70% ». En forme de V, ils ont été pensés pour être robustes et éviter la prise d’algues ou de déchets. De plus, NepTech a breveté un système d’injection d’air sous la coque pour réduire les frottements, exploitant le compresseur d’air de la pile à combustible. « En sortie de système pile à combustible, il y a un souffle constant à forte pression qui n’est pas valorisé pour les applications terrestres et s’échappe dans l’air ambiant. On a donc breveté de réutiliser cet air pour le réinjecter sous la coque des bateaux et avoir une vraie différenciation, car c’est de l’énergie gratuite ».
Pour l’efficacité énergétique, les bateaux ont été conçus pour être le plus compact possibles. Par ailleurs, « on pense que les plateformes de type catamaran, très stables, sont bien adaptées aux propulsions électro-hydrogène car on peut intégrer les volumineux réservoirs dans les hauts, au-dessus des passagers, ce qui permet aussi de diminuer les risques lors des opérations ». Enfin, NepTech collabore avec D-Ice Engineering, entreprise d’ingénierie et de recherche, sur l’utilisation de l’énergie à bord ainsi que sur une assistance au pilotage. « Nos cibles sont de tenir une à deux journées d’autonomie sur un profil type d’allers-retours toute la journée pendant 12 heures. Deux journées en hydrogène et une journée complète sur les 100% batteries pour recharger la nuit », indique Clément Rousset.
JO 2024
NepTech a répondu à des appels d’offres et espère annoncer la commercialisation de son premier passeur portuaire NepFerry fonctionnant avec des batteries en début d’année prochaine pour un lancement un an plus tard. A moyen terme, la start-up, qui souhaite que les navires soient construits dans des chantiers français, a pour ambition de sortir son premier navire à hydrogène à l’horizon fin 2023.
En effet, l’entreprise a été lauréate avec EODev (Energy Observer) et Toyota de l’appel à innovations « Mobilités Jeux Olympiques et Paralymiques Paris 2024 » pour deux navires de transports de passagers à hydrogène sur la Seine et à Marseille. Il s’agit d’associer les navires aux stations flottantes de recharge d’hydrogène développées par EODev avec des piles REXH2 de Toyota.
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