« Une révolution dans l’industrie du transport maritime ». C’est ce qu’annonce la jeune société nantaise Advanced Aerodynamic Vessels, qui a travaillé dans le plus grand secret, ces derniers mois, à la validation scientifique, technique et commerciale d’un nouveau concept de navire de transport plus confortable, plus rapide et deux fois moins gourmand en énergie.
Le principe de sustentation
Issue de l’Ecole Centrale de Nantes, dont le laboratoire d’hydrodynamique pourra être mis à contribution pour les essais en bassin, l’équipe scientifique et technique d’A2V a mis en évidence la possibilité de s’appuyer efficacement à la fois sur l’air et sur l’eau pour sustenter un navire, avec pour conséquence de réduire de moitié la résistance à l’avancement. Le nouveau navire, dit « à portance aérodynamique partielle », se montre donc particulièrement économe en énergie à des vitesses supérieures à 60 noeuds du fait d'une traînée sensiblement réduite. Pour valider leurs travaux et sécuriser les investissements futurs, il fallait qu'un organisme indépendant confirme l'excellent niveau de performance énergétique découlant du design très novateur du navire. Dans le même temps, il convenait de s'assurer de la faisabilité technique et enfin de l'existence de réels débouchés commerciaux.
Validation technique et avant-projet
La société Hydrocéan, qui met en œuvre des outils avancés de modélisation et de simulation numérique, a confirmé les résultats obtenus par A2V en matière de portance et de traînée du navire à haute vitesse. A partir de ces résultats, il a été démontré que le navire avait une traînée divisée par deux, à 55 nœuds, par rapport aux plateformes traditionnelles équivalentes ; ce qui constitue selon A2V une rupture technologique majeure.
Le cabinet Marc Lombard Architecture Navale, qui étudie et réalise des navires à voile et à moteur très techniques, a été retenu par A2V pour son expertise mondialement reconnue. L’entreprise lui a confié une étude d'avant projet d'un navire de transport de 24 mètres offrant une capacité d'accueil de 120 passagers. Les premiers plans sont terminés, ils prennent en compte les contraintes de certification, sachant qu’A2V travaille avec le Bureau Veritas pour les aspects règlementaires. La faisabilité technique du navire est maintenant acquise. « La sustentation aérodynamique partielle offre une nouvelle voie à très fort potentiel pour l’architecture navale, c’est une véritable opportunité pour la filière navale française que nous comptons bien développer à très courte échéance », estime Marc Lombard. Fort de cette validation, le cabinet Lavoix a déposé à l’INPI une demande de brevet couvrant la nouvelle technologie.

Le logo d'A2V montre une ébauche du design (© A2V)
La construction d’un prototype prévue cette année
En attendant que celui-ci soit validé, le design ne sera pas dévoilé. Il semble néanmoins que le logo d’A2V donne une petite idée de ce à quoi, dans les grandes lignes, un tel bateau pourra ressembler vu de face. Alors que le concept pourra être décliné sur une gamme de navires en composite de 15 à 40 mètres, A2V va lancer cette année la fabrication d’un prototype d’une dizaine de mètres, afin de valider à la mer les performances de la plateforme. « Notre objectif à terme est de proposer à nos clients un navire qui leur offre un avantage concurrentiel décisif », affirme Matthieu Kerhuel, directeur général d’A2V.
Transport de passagers, offshore et plaisance
Concernant le projet d’unité de 24 mètres, la société a identifié plusieurs segments de marché accessibles, dont le transport de passagers, l’offshore pétrolier et la grande plaisance. Tous font déjà l’objet de rencontres avancées avec de futurs clients en France et à l’étranger, précise la société : « Le transport de personnes combinant hautes vitesses et faible consommation, sur des trajets côtiers et en soulagement de la route ou du rail, a déjà reçu le soutien de plusieurs ports et chambres de commerce. Le marché mondial dans ce domaine est estimé à plusieurs centaines de millions de passagers transportés tous les ans. Une première approche du marché des services à l’Offshore laisse augurer plusieurs dizaines de navires à construire dans un avenir proche ».
Les navires de surveillance
En parallèle, une étude sur le marché des patrouilleurs, réalisée avec le concours d'Atlanpole (Centre Européen d’Entreprises et d’Innovation de Nantes Atlantique), vient de remettre ses premières conclusions. D’après le document, il existe un vaste marché à l'international, qui s’élève à 1.2 milliard d’euros par an, pour la gamme de navires qu'A2V entend commercialiser. Ainsi, environ 700 navires appartenant à des marines et autres administrations étrangères sont à remplacer dans les dix années à venir. Certes, la concurrence dans ce domaine est déjà rude, notamment entre constructeurs français, mais A2V estime que son concept peut percer en s’appuyant sur sa robustesse, sa très haute vitesse et ses performances énergétiques inégalées.
En attendant, la société va poursuivre ses travaux techniques et ses démarches de prospection commerciale en France et à l'étranger. Une levée de fonds auprès d'investisseurs sera par ailleurs lancée à la fin du premier trimestre 2014.