Quatre bateaux de pêche destinés au quartier maritime du Guilvinec sont actuellement en construction chez Gléhen. Un chantier né il y a plus d'un siècle au Guilvinec et qui, aujourd'hui, s'étire sur trois sites : Loctudy, Le Guilvinec et Douarnenez. Yves et Pierre-Yves Gléhen reviennent sur cette histoire familiale et expriment leurs attentes pour l'avenir, notamment l'impérieuse nécessité d'un plan de renouvellement de la flottille.
Cela fait plus d'un siècle que Gléhen fait des bateaux. Pour la pêche essentiellement. Actuellement, le chantier en construit quatre (un hauturier, trois côtiers) pour le quartier maritime du Guilvinec. « 2017, c'est 100 % pêche, quatre bateaux d'un coup, cela n'était pas arrivé depuis sept ans », souligne Yves Gléhen, président d'une entreprise familiale qui dispose de trois sites. À Douarnenez, la construction et la réparation, à Loctudy et au Guilvinec, la réparation. C'est d'ailleurs au Guilvinec que tout a commencé en 1911. « Le premier chantier a été créé à Lostandro, par mon grand-père ». Pierre Gléhen a fait son apprentissage quelques années plus tôt au Havre, dans la construction des chasseurs de mines. De retour au pays, il se lance dans la construction navale. « C'est un métier qui le passionnait. Mon arrière-grand-mère avait ce terrain à Lostandro, dans l'arrière-port ». L'affaire est lancée et le chantier va construire, jusqu'en 1974, des navires en bois destinés principalement à la pêche.
Quatre générations
1911, c'est l'époque des grandes sardinières. « Mon grand-père a tout de suite innové dans la façon de construire des bateaux », précise Yves Gléhen. L'innovation ce sont les membrures bouillies. Avec un résultat immédiat : « Les bateaux étaient beaucoup plus légers ». Jusqu'en 1943, Pierre et son fils Pierre vont travailler ensemble. Ce dernier décide, quelques années plus tard, de créer son propre chantier à Audierne avant de revenir au Guilvinec en 1957 où il crée un autre chantier. « Nostalgie de Bigouden... Il a acheté l'ancienne usine à gaz ». À cette époque, il y a alors deux chantiers Gléhen au Guilvinec. C'est dans celui de son père qu'Yves entre en 1962. « J'étais plus à Audierne qu'au Guilvinec », explique-t-il. Sept ans plus tard, il prend la direction des deux sites. Le chantier d'Audierne est finalement vendu en 1973. « C'est devenu AquaShow », précise Pierre-Yves Gléhen, responsable de projet. À 23 ans, fraîchement diplômé de ENSTA Bretagne à Brest, Pierre-Yves Gléhen a intégré le chantier familial en septembre dernier. C'est la quatrième génération. Le jeune homme ne s'est pas trop posé la question. « Une fois qu'on est dedans... J'allais au chantier avec mon grand-père, je voyais les bateaux ». Pour celui qui est ingénieur en architecture navale, diplômé en alternance à DCNS Lorient, intégrer l'entreprise familiale « cela sonnait comme une évidence ».
Abandon du bois
Le grand changement, c'est 1974. Au Guilvinec, on construit des bateaux en bois. « J'ai transformé le chantier en construction navale acier aluminium. J'ai abandonné le bois », explique Yves Gléhen. La décision passe mal. Il évoque un « conflit de génération » avec son père. Mais la chance est là. Le chantier décroche un premier contrat pour un côtier de 15 m pour le Loctudiste Louis Le Roux, alors président du comité local des pêches du Guilvinec. « Son bateau s'appelait l'Amour ». Dans la foulée (1976) le site de Loctudy voit le jour. « Il y avait une flotte de pêche, j'ai créé un atelier d'entretien et de réparations pour suivre mes clients ». Le site de Douarnenez arrive un peu plus tard. En 1985. « J'ai eu la chance de décrocher une commande de crevettiers-congélateurs pour la Guyane en 1984 ». Des bateaux de 22 m pour lequel Gléhen ne dispose pas de l'espace nécessaire. Coïncidence, à Douarnenez, le Chantier naval de Cornouaille vient de déposer le bilan. « J'ai repris le site en 1985 ». En janvier 2016 le Chantier naval Gléhen Pierre & Fils devient la SAS Chantier naval Gléhen. Yves Gléhen en devient président, Gaël Guillemin, directeur général.
« On est fragile »
S'il a surtout construit pour la pêche, Gléhen a aussi su se diversifier. Dans les navires à passagers en 1990, dans l'activité fluviale dix ans plus tard. En 2013, le chantier livre même sa première embarcation pour la Marine nationale. Le dernier bateau construit au Guilvinec, c'était il y a plus de dix ans. « J'ai arrêté la construction pour raison économique ». Le chantier, alors situé dans l'arrière-port, imposait que la construction se finisse à quai. « Ce n'était pas viable ». Toute la construction bascule alors à Douarnenez. Mais Gléhen ne quitte pas pour autant Le Guilvinec. Il y a sept ans, atelier et bureaux rejoignent les quais du Guilvinec où le chantier continue de regarder vers l'avenir. « On est fragile », reconnaît toutefois Pierre-Yves Gléhen mais le jeune homme dit sa confiance. « Je ne serais pas entré au chantier si je ne croyais pas en l'avenir ».
Un article de la rédaction du Télégramme