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MSC Cruises a lancé l’an dernier un nouveau plan d’investissement qui entre en 2015 dans sa phase concrète. Deux prototypes d’une nouvelle génération de paquebots, livrables en 2017, sont désormais en chantier. Deux unités du type Vista ont été commandées à Saint-Nazaire, où  la construction du MSC Meraviglia a débuté en avril, et deux autres ont été confiées à Fincantieri, qui a procédé à la découpe de la première tôle du MSC Seaside le 22 juin. L’occasion de faire faire le point sur les nouveaux projets et la stratégie de la compagnie avec Gianni Onorato, directeur général de MSC Cruises.

 

MER ET MARINE : Ces contrats comportent également des options pour trois navires, soit deux en France et un en Italie. Peut-on aujourd’hui considérer que ces options sont acquises et que ces navires seront bien réalisés ?

GIANNI ONORATO : La chose la plus importante est le montage financier mais, quand on signe des commandes, l’esprit est bien entendu de confirmer les options. Il y a d’abord des prototypes que l’on conçoit et que l’on évalue, puis il y a les options. Nous avons aujourd’hui deux Vista en commande à Saint-Nazaire et deux Seaside en Italie. Notre intention est de confirmer l’option pour le troisième Seaside d’ici 2017 (pour une livraison en 2021, ndlr) et aussi celles des troisième et quatrième Vista, dont nous prévoyons la mise en service en 2021 et 2022.

MSC Cruises avait, jusqu’ici, toujours confié ses nouveaux projets  à Saint-Nazaire, d’où sont sortis ses 12 navires. Pourquoi, cette fois, avoir aussi choisi de travailler avec Fincantieri ?

Notre nouveau plan d’investissement est colossal et aucun constructeur n’était capable de réaliser seul ces navires. Saint-Nazaire, c’est notre chantier mais STX France ne pouvait pas produire deux prototypes aussi différents et livrables à quelques mois d’intervalle, en juin et novembre 2017. Nous avons donc décidé de travailler en complément avec Fincantieri, qui avait de la disponibilité.

Les chantiers italiens vont donc construire le MSC Seaside, qui s’annonce comme un navire très innovant et qui présente une architecture particulièrement originale…

Le style est très important et le MSC Seaside sera un navire définitivement différent dans son design comme dans son look. Il sera si j’ose dire très « sexy » et donc attrayant. Ce sera un grand paquebot avec de nombreuses nouveautés. Notre objectif est d’offrir une expérience différente, notamment en termes de restauration et d’Entertainment.

Ce navire se caractérisera par ses vastes ponts extérieurs...

Le MSC Seaside disposera de 30.400 m² d’espaces publics intérieurs et  13.100 en extérieur. Cela représente un ratio de 3.2 m² par passager, ce qui est très important et permettra d’offrir beaucoup d’espace à nos clients, spécialement dehors, où chacun pourra trouver une chaise longue. Ce nouveau type de navire adopte le concept de Beach Condo (appartements donnant sur la mer, ndlr). Il est conçu pour naviguer dans les régions chaudes. Ce sera les Caraïbes au départ de Miami pour le MSC Seaside dès sa mise en service, mais nous pourrons aussi exploiter cette nouvelle classe, à l’avenir, dans d’autres régions ensoleillées, comme la Méditerranée en été, ou encore les Emirats et l’Amérique latine en hiver.

Avec Vista et Seaside, votre approche de la croisière évolue clairement. Longtemps, MSC Cruises a semblé, du moins pour certains équipements, s’inspirer de son principal concurrent, Costa. Cette fois, vos futurs navires s’inscrivent clairement dans le sillage des meilleures compagnies américaines, comme Royal Caribbean et NCL, les grandes références mondiales de l’industrie…

Les navires de MSC Cruises n’ont, en fait, pas beaucoup de points communs avec ceux de Costa. Concernant les Américains, c’est un marché que nous regardons et sur lequel nous souhaitons nous développer. Le MSC Seaside a été pensé dans cet esprit puisqu’il sera basé à l’année à Miami. Nous offrirons  toutefois un concept différent, avec notre propre produit et un navire marqué par la présence de vastes espaces extérieurs, ce dont sont dépourvus la plupart des paquebots américains.

Vous vous inspirez tout de même des majors US, par exemple au niveau de la restauration et du divertissement…

Il y aura à bord de nos nouveaux navires plus d’activités et de formules de restauration mais cette évolution ne touche pas que les Etats-Unis. Tous les marchés évoluent en ce sens car les consommateurs cherchent quelque chose de différents. Dans cette perspective, MSC Cruises a de grandes opportunités car c’est une compagnie très jeune, en plein développement et qui est donc en mesure d’apporter de nombreuses nouveautés à même de séduire une clientèle toujours plus large.

Quels marchés sont pour vous prioritaires ?

Nous souhaitons nous développer sur le marché américain, mais aussi en Allemagne et au Royaume-Uni. Il est également impératif que nous poursuivions notre croissance en France, où nous devons démontrer que nous sommes une compagnie idéale avec une offre variée correspondant aux attentes de la clientèle.

Avant de revenir sur le marché français, restons sur les Etats-Unis, où vous allez repositionner un navire, le MSC Divina, à partir de la fin de l’année, avant d’y lancer le MSC Seaside en 2017. Le Divina avait réalisé une première saison à Miami pendant l’hiver 2013/2014 avec un succès mitigé puisque le produit demeurait très européen et n’a pas toujours séduit la clientèle américaine. On imagine que, pour votre retour sur le marché américain, les leçons de cette première expérience ont été tirées et m’offre adaptée ?

La réputation de MSC sur le marché nord-américain était très semblable à celle de Costa. En fait, ce n’était pas un marché stratégique mais une tactique de repli pendant la saison hivernale. Nous n’étions donc pas concentrés sur la customisation du produit.

Les choses ont changé et le produit à bord du MSC Divina sera clairement adapté au marché américain. En matière de service, nous allons par exemple bénéficier des personnels formés dans une nouvelle école que nous avons ouverte aux Philippines et qui s’ajoute à celles dont nous disposons déjà en Indonésie, à Maurice ou encore à Madagascar. Cela nous permet, pour chaque nationalité présente à bord, d’avoir du personnel très professionnel et qui parle les principales langues des passagers.

Adaptez vous le produit en fonction des retours de chaque nationalité?

Tout à fait et nous avons créé à notre siège de Genève un nouveau Département Produit qui s’appuient sur des porte-drapeaux de la marque dédiés aux différentes nationalités. Ils sont les garants de leurs marchés respectifs, facilitent la remontées des retours clients et permettent de vérifier que les produits sont bien customisés, notamment sur le service. C’est un investissement à long terme mais je pense que c’est très important, même pour une compagnie globale comme la nôtre. 

La France est actuellement le marché le plus dynamique d’Europe et affiche une forte croissance. Comment voyez-vous l’avenir du marché hexagonal pour MSC ?

La croissance en France peut s’opérer dans différentes directions. C’est le marché où il y a le plus d’opportunités et nous allons réaliser des investissements importants dans notre organisation, avec des équipes renforcées. Nous devons travailler encore plus étroitement avec les agences de voyage, pour lesquelles nous avons développé une nouvelle plateforme B to B. Elles demeurent notre priorité mais, pour les consommateurs qui ne vont pas en agences de voyage, il faut aussi  développer le web et les ventes directes en B to C.

La situation demeure délicate pour de nombreuses agences de voyage, confrontée à la vive concurrence d’Internet. Comment va s’en sortir le réseau de vente traditionnel ?

Les agences de voyage vont se renouveler parce que le marché l’exige. Ce seront de plus en plus des consultants en voyages et nous devons travailler avec elles pour accompagner cette évolution, c'est-à-dire leur permettre de ne pas seulement prendre des réservations, mais aussi de pousser des produits. Pour cela, nous nous appuyons par exemple sur des outils nouveaux et des systèmes innovants, comme des lunettes virtuelles permettant de découvrir ce qu’est une croisière.

MSC Cruises a fait le choix des très grands navires, avec des milliers de passagers à bord.  Au-delà des avantages en matière de rentabilité et d’économies d’échelle, qui permettent grâce à ces gros bateaux de proposer des prix très attractifs, quels sont les atouts des paquebots géants ?

Les grands paquebots offrent une multitude de possibilités à nos clients. Chacun peut trouver un espace ou une activité correspondant à ses attentes. Ainsi, sur un bateau de 5000 personnes, nous accueillons tous les types de clientèle. En fait, notre système est basé sur l’expérience, ou plutôt un ensemble d’expériences que nous renouvelons sans cesse. Avec nos nouveaux navires, qui compteront neuf restaurants, dont quatre thématiques, nous allons par exemple développer l’offre culinaire. D’importantes innovations seront également proposées en matière de spectacles. Nous travaillons aussi sur le renforcement de notre offre Bien-être. Cela passe par le Spa, mais aussi des activités particulières, comme les cours de yoga, de pilates, de gymnastique sophistiquée, ainsi qu’une nourriture spécifique. Toutes ces nouveautés, nous les introduisons en écoutant les retours et les demandes de la clientèle.

Comme vous l’avez dit, votre clientèle est très large et comprend même le marché haut de gamme avec le MSC Yacht Club…

Oui, le MSC Yacht Club, qui est un complexe de suites comprenant des espaces dédiés, dont un solarium,  une piscine, un restaurant et un salon, fonctionne très bien. Ce concept, lancé avec les Fantasia et qui sera encore amélioré sur nos nouveaux navires, attire un autre type de clientèle qui, en dehors de son espace privatif haut de gamme, peut bénéficier des autres espaces publics et de tous les avantages que procure un grand bateau.

Les paquebots ne cessent de voir leur taille augmenter. Une course au gigantisme qui commence à poser des problèmes, par exemple en Méditerranée, où les infrastructures portuaires ne sont plus toujours suffisantes. Une situation qui pourrait s’aggraver dans les prochaines années avec l’entrée en flotte de navires encore plus gros… Qu’en pensez-vous ?

Nous sommes très attentifs à la situation et investissons beaucoup dans les ports. Notre choix est celui des grands navires mais vous aurez remarqué que nos nouvelles unités sont plus courtes. Nous avons en effet mesuré la capacité des ports et décidé de réduire la longueur des futurs paquebots. Ainsi, le MSC Meraviglia pourra aller partout sans avoir à modifier les infrastructures portuaires.

En termes de destinations, vous vous développez progressivement à l’international. L’une des grandes questions est maintenant de savoir quand MSC Cruises positionnera son premier navire en Asie, considérée par beaucoup comme le nouvel El Dorado de la croisière…

Tout le monde va effectivement en Asie mais nous devons faire les choses par étape. Nous n’avons pas de croissance de capacité en 2016 et elle sera faible en 2017 car nos nouveaux navires ne seront mis en service qu’à partir du mois de juin. En 2018, en revanche, le développement de la flotte pourra sans doute offrir des opportunités sur de nouvelles destinations.

La compagnie développe aussi des croisières longues et a réalisé avec succès, cette année, un premier grand voyage : le périple de 33 jours effectué par le MSC Orchestra entre les Emirats et l’Australie. Malgré les excellents retours de cette première expérience, vous n’avez pas programmé un autre grand voyage en 2016 et 2017. Pourquoi ?

La raison est toujours la même, nous manquons actuellement de navires et attendons avec impatience nos nouvelles unités.

Et les grands tours du monde d’une centaine de jours, y songez-vous ?

Pas encore car nous n’avons pas une base suffisante de repeaters. Mais je pense que cela se fera à l’avenir.

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Interview réalisée par Vincent Groizeleau © Mer et Marine, juin 2015

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