Sous l’impulsion de ses nouveaux propriétaires, la compagnie norvégienne a entrepris de développer son activité sur les croisières d’expédition polaires. Il s’agit de compléter le cœur de métier historique de l’armateur, qui exploite depuis 1893 l’Express côtier, service de desserte des ports norvégiens entre Bergen et Kirkenes. « Nous allons nous repositionner et reprendre notre place légitime sur les croisières d’exploration. Hurtigruten est déjà leader sur l’Arctique avec la Norvège mais aussi les traversées du Nordstjernen vers le Spitzberg, où nous avons plus que doublé notre capacité cette année. S’y ajoute le Fram, notre navire d’exploration, qui sillonne l’Arctique, jusqu’au Groenland, et passe également ses hivers en Antarctique, où nous allons positionner un second navire en 2016 », explique Christine Bois, directrice générale d’Hurtigruten en France. La capacité de la compagnie disponible sur l’Antarctique va passer de 250 à 700 passagers, soit pour l’ensemble de la saison 2016/2017 jusqu’à 6800 personnes au lieu de 2268 précédemment. De quoi prétendre à une position de leader sur ce marché.

Le Fram en Antarctique (© : HURTIGRUTEN)

Le Fram en Antarctique (© : JESPER NIELSEN)
Le Midnatsol des fjords chiliens à l’Antarctique
Annoncé fin mai, le déploiement du Midnatsol en Antarctique (qui va nécessiter l’acquisition d’un nouveau navire pour l’Express côtier dès septembre 2016) est la première grande initiative de la compagnie dans le cadre de son nouveau plan stratégique sur les zones polaires. Mis en service en 2003, ce navire de 135.75 mètres de long pour 21.5 mètres de large présente une jauge de 16.151 GT. Dans sa configuration de desserte des ports norvégiens, il peut transporter jusqu’à 1000 passagers, son garage étant conçu pour accueillir 45 voitures. Pour l’Antarctique, cette capacité sera bien entendu revue à la baisse, la règlementation limitant les débarquements sur les sites de la péninsule à 100 personnes maximum. « La capacité du Midnatsol est importante car sur l’Express côtier nous avons un certain nombre de passagers qui ne restent à bord que quelques heures, le temps de passer d’un fjord à l’autre. En fait, le Midnatsol compte 600 lits et, en Antarctique, sa capacité sera limitée à 500 passagers ». Pendant l’hiver 2016/2017, alors que le Fram sera positionné comme à son habitude à Ushuaia pour évoluer directement vers l’Antarctique, le Midnatsol sera basé à Punta Arenas. Il proposera un superbe itinéraire comprenant les fjords de la Patagonie chilienne, la péninsule Valdés (réputée notamment pour la présence de baleines), le Cap Horn, le détroit de Magellan, les Malouines et la péninsule antarctique.

Le Midnatsol (© : HURTIGRUTEN)
Comme le Fram, le Midnatsol sera spécialement équipé pour être exploité dans cette région polaire. Le navire, dont le vaste pont garage servira au stockage de matériel, sera doté d’embarcations pour assurer le transfert des passagers sur les sites, avec une drome comprenant notamment des semi-rigides du type Polar Circle Boats, mieux adaptés que les bateaux gonflables aux opérations d’embarquement et de débarquement.

Polar Circle Boat (© : HURTIGRUTEN)
Depuis le navire, les manœuvres seront menées à partir d’une rampe située à bâbord, près de la ligne de flottaison. Il s’agira en fait de la porte de bordé servant aujourd’hui au fret et qui sera modifiée pour servir de plateforme d’embarquement. Cette disposition permettra de protéger du vent les embarcations durant les manœuvres, qui pourront ainsi être réalisées dans les meilleures conditions de sécurité.
Une offre complémentaire pour une clientèle différente
Pour le reste, le Midnatsol est en fait, dans sa configuration actuelle, déjà bien adapté à sa future mission. « Ce navire se prête vraiment à ce type de croisière d’exploration. Il dispose d’un salon panoramique sur deux ponts et d’une salle de conférence en amphithéâtre, où les passagers pourront suivre les nombreuses conférences proposées à bord », note Christine Bois.

Le salon d'observation (© : NINA HELLAND)

Suite (© : OYVIND GRONBECH)

Cabine (© : STEIN LILLEBO)
Le navire, qui devrait bénéficier d’un nouveau système de communication par satellite afin de proposer à ses passagers une bonne connexion à Internet, permettra à Hurtigruten de compléter l’offre du Fram avec des croisières différentes mais aussi de toucher une nouvelle clientèle. « Les traversées que nous aurons sur le Midnatsol seront un peu moins sportives que les croisières à bord du Fram, bien que l’on pourra aussi proposer quelques bivouacs sur les sites visités et des sorties en kayak de mer. Avec 500 passagers, nous aurons l’opportunité de développer une politique tarifaire intéressante avec des prix d’appel moins élevés. Je pense que nous attirerons plus la génération des baby boomers, voire une clientèle familiale. Le Midnatsol sera également beaucoup plus accessible pour les passagers individuels compte tenu du nombre plus important de cabines, alors que nous sommes très limités de ce point de vue sur le Fram ».

En Antarctique à bord du Fram (© : KARDSTEN BIDSTRUP)
Des croisières plus sportives sur le Fram
Alors que le Midnatsol proposera 16 départs dans la région (dont 10 comprenant l’Antarctique) de septembre 2016 à avril 2017, le Fram sera exploité sur 9 autres traversées. Basé à Ushuaia, le navire d’expédition de la compagnie a été mis en service en 2007. Long de 114 mètres pour une largeur de 20 mètres, ce bateau de 11.647 GT peut accueillir jusqu’318 passagers mais, sur l’Antarctique, il sera l’an prochain limité à moins de 200 personnes. L’arrivée du Midnatsol va en effet entrainer une évolution des croisières proposées par le Fram d’octobre à mars (de 9/10 jours vers l’Antarctique et jusqu’à 16 jours avec la Géorgie du sud). Celles-ci viseront une clientèle plus jeune et active, avec une expédition à tendance sportive comprenant de nombreuses activités, dont des sorties régulières en kayak dans les baies glacées, la possibilité de passer une nuit dans un campement près d’une colonie de manchots (l’équipe d’expédition dispose pour cela de 10 tentes adaptées aux régions polaires) ou encore des excursions en ski.

Kayak de mer en Antarctique (© : ESTHER KOKMEIJER)
Le Fram réalisera, en fonction de la météo et des sites rencontrés, au moins deux débarquements par jour. « Nous allons proposer des escales inaccessibles aux bateaux de plus de 200 passagers et le programme va être affiné. Même si le Fram offre un voyage tout confort, l’idée est d’être vraiment dans l’expédition avec un produit beaucoup plus poussé, notamment pour les débarquements ». Il y aura également des nouveautés à bord, où les passagers peuvent mieux découvrir l’Antarctique grâce à l’équipe d’expédition, composée de spécialistes et d’amoureux de la région, et à un cycle de conférences thématiques (faune marine, oiseaux, climat, formation des icebergs…). Hurtigruten travaille sur différents projets complémentaires. La compagnie compte ainsi nouer des partenariats avec des équipementiers pour proposer des formations à la photographie et avoir la possibilité d’acheter du matériel adéquat.

La Géorgie du Sud (© : HILDE FOSS)
Cap sur le cercle arctique
En dehors de l’Antarctique, le Fram est aussi un grand habitué de l’Arctique. Pendant l’été, il sillonne les eaux du Grand Nord, allant du Spitzberg au Groenland en passant par l’Islande. « Nous allons de plus en plus tôt au Spitzberg, que nous proposons dès la fin du mois d’avril. C’est une période idéale car il y a déjà le Soleil de minuit, avec de magnifiques journées de 24 heures pendant lesquelles on découvre l’archipel en bénéficiant de nombreuses activités, comme des sorties en motoneiges et chiens de traineaux. En juillet, nous sommes également les seuls à proposer cinq rotations complètes de l’île du Spitzberg. A cela s’ajoutent de superbes croisières vers l’Islande et le Groenland, qu’il s’agisse de la côte ouest ou de la côte est. Il y a là énormément de choses à découvrir et des paysages à couper le souffle ».

Le Groenland (© : TRYM IVAR BERGSMO)

Le Fram et ses PCB au Groenland (© : LINDA DRAKE)
Un bateau traditionnel au cœur du Spitzberg
Hurtigruten a également testé avec succès, cette année, un produit basé sur un petit navire traditionnel positionné au cœur du Spitzberg. Il s’agit du Nordstjernen, très beau bateau de 80 mètres et 70 cabines construit en 1956 et modernisé plusieurs fois depuis. Au départ du petit port de Longyearbyen, capitale du Spitzberg que les passagers rejoignent en avion et qu’ils découvrent durant deux jours, le navire réalise ensuite quatre jours de navigation pendant lesquels de nombreux sites sont visités au moyen d’embarcations. Avec comme toile de fond les glaciers et falaises peuplées d’oiseaux arctiques. Et de bonnes chances d’observer des ours polaires, qui font la réputation de la région et se montrent de plus en plus souvent. Compte tenu du succès remporté cette année par cette nouvelle offre, qui a été lancée début juin et durera jusqu’à fin août (soit en tout 21 croisières), Hurtigruten a décidé de ré-affréter le Nordstjernen à l’été 2016 pour reconduire l’expérience.

Le Nordstjernen au Spitzberg (© : HURTIGRUTEN)

Le Nordstjernen au Spitzberg (© : HURTIGRUTEN)
Un programme d’exploration sur trois unités de l’Express côtier
Alors que d’autres projets de croisières d’expédition sont à l’étude, la compagnie a, en outre, décidé d’approfondir le concept d’exploration sur trois navires affectés à l’Express côtier. A partir de l’an prochain, le Nordnorge, le Nordlys et le Nordkapp (122 mètres, 12.200 GT, 623 passagers) proposeront de nouveaux programmes. « Il s’agit de répondre à une demande de la clientèle qui souhaite explorer plus en profondeur la Norvège. L’offre en matière de conférences et d’excursions sera plus poussée et il sera notamment possible de réaliser de grandes randonnées avec une équipe d’expédition qui sera formée par celle du Fram », précise Christine Bois.

L'Express côtier (© : ANDREAS MIATSCH)

Aurore boréale sur l'Express côtier (© : HURTIGRUTEN)
Des voyages adaptés aux passagers francophones
Compagnie norvégienne, Hurtigruten accueille une clientèle internationale comprenant de plus en plus de passagers Français. Ils devraient être plus de 10.000 cette année contre 9500 en 2014 et 8000 en 2013. Pour poursuivre sa croissance sur le marché hexagonal, la compagnie continue de renforcer son offre à destination du public francophone. Des accompagnateurs français sont non seulement présents sur certaines traversées de l’Express côtier ou du Nordstjernen au Spitzberg, mais aussi sur les croisières d’exploration du Fram. Et ce sera également le cas sur le Midnatsol. « Sur l’Antarctique notamment, nous avons des accompagnateurs français à bord sur certains départs. Et ce sont des professionnels de cette destination, avec lesquels nous travaillons depuis des années. De plus, certains conférenciers sont francophones ».

L'Express côtier (© : TRYM IVAR BERGSMO)