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Le paquebot Costa neoRomantica a affronté en fin de semaine dernière une violente tempête en Méditerranée occidentale. Parti de Trapani, en Sicile, le navire remontait vers Marseille lorsqu’il s’est retrouvé jeudi, à l’Est de la Sardaigne, face à des conditions difficiles, avec des creux de 6 à 7 mètres et un fort vent soufflant à 60 nœuds en rafales. Un coup de tabac prévu par les météorologistes et qui, bien qu’impressionnant, n’était pas de nature à désemparer un paquebot. Les marins le savent bien, les passagers manifestement beaucoup moins. De nombreux croisiéristes ont en effet eu très peur car le Costa neoRomantica, qui n’est pas non plus un géant avec ses 220 mètres de long et 57.000 GT de jauge, a été logiquement balloté par les flots. Certaines cabines se sont en plus retrouvées les pieds dans l’eau. Non pas à causes de fissures ou de brèches dans la coque, ce que certains croyaient savoir, ni apparemment en raison d’une rupture de canalisations, comme cela arrive parfois dans le gros temps, mais selon Costa suite à une infiltration dans des bouches d’aération situées dans les hauts. Si l’on s’en réfère aux images et aux témoignages, une partie des 933 passagers, effrayés, sont allés chercher leurs gilets de sauvetage, craignant un abandon du navire. Avec au passage quelques scènes de « panique », la peur étant évidemment très communicative, surtout parmi les « non initiés ».

Un bateau ça bouge et il y aussi des tempêtes en Méditerranée…

Alors que la compagnie précise que le Costa neoRomantica n’a eu aucun problème de propulsion, cette affaire démontre une nouvelle fois la méconnaissance qu’ont de la mer de nombreux croisiéristes, sachant que de manière générale la majorité des passagers embarquant sur des paquebots le font pour la première fois. Il ne faut évidemment pas être grand clerc pour savoir qu’à l’instar d’un avion rencontrant des turbulences, un bateau bouge en mer, à fortiori quand il y a de la tempête. Et que des tempêtes, il y en a souvent en hiver, y compris en Méditerranée. Cette mer, malgré sa réputation de grand lac calme, peut se montrer très dure, et même plus rude que l’Atlantique, avec une houle courte et croisée, qui malmène les bateaux.  Certains ont été manifestement très inquiets en voyant la proue du Costa neoRomantica s’enfoncer dans les flots, puis remonter et refrapper la mer avec un grand bruit sourd. Là encore, rien d’anormal. Le commandant a fait différentes annonces et tenu au courant les passagers de l’évolution de la situation. Mais cela n’a manifestement pas suffit à calmer tout le monde. L’analogie avec les turbulences dans le transport aérien est intéressante car, contrairement aux bateaux, les passagers d’un avion, même s’ils ont peur, sont assis et se cramponnent à leur siège, ne pouvant communiquer qu’avec leurs voisins immédiats. Sur un bateau, on circule, on parle, on observe les regards et les mines inquiètes de nombreuses personnes. En somme, on se fait un sang d’encre beaucoup plus facilement. Surtout que les mouvements en mer sont plus impressionnants visuellement, puisqu’on voit les énormes vagues passer au dessus des sabords, et à l’occasion des objets et des gens qui tombent.

Mieux communiquer auprès des passagers ?  

A sa décharge, le grand public n’a pas forcément conscience de l’ampleur des mouvements que peuvent connaitre les navires, même les plus gros paquebots. Seuls les croisiéristes avertis et les passagers partant pour des voyages d’expédition sont plus au fait des conditions difficiles qu’ils peuvent être amenés à rencontrer (avec pour l’Antarctique par exemple des mers biens plus fortes sur des bateaux beaucoup plus petits). Bien que ce ne soit évidemment pas un argument commercial, il serait sans doute intéressant que les compagnies communiquent un peu plus la possibilité de rencontrer des tempêtes, particulièrement en hiver. Cela éviterait probablement de se retrouver, même si les cas sont finalement rares, avec ces scènes d’hystérie accompagnées de leur lot d’énormités, du style « on avait l’impression d’être sur le Titanic ! » ou « On a cru revivre le naufrage du Concordia » comme on a pu l’entendre ce week-end.

Les media généralistes se lâchent

Des témoignages de passagers sur lesquels un certain nombre de nos confrères des media généralistes se sont rués, sans grande mesure ni retenue : « Sa croisière de rêve a failli se terminer au fond de la Méditerranée » lance ainsi le commentaire d’un reportage télé, rien de moins !

Bref, ce qui est en réalité un non évènement maritime a fait les choux gras de certains journaux, notamment dans le sud-est de la France. L’actualité de fin de semaine dans la région n’était peut-être pas débordante et, le naufrage du Costa Concordia étant encore très présent dans les esprits, un tel sujet un brin monté en épingle, c’est de l’audience garantie… Surtout qu’une partie des passagers prend désormais l’habitude d’appeler la presse et de crier au scandale sur les réseaux sociaux avant même de tenter de se renseigner et de comprendre l’évènement qu’ils viennent de vivre. On peut néanmoins comprendre la peur légitime de certains et, par conséquent, appeler les gens à se renseigner avant de partir en hiver. Il suffit d’aller faire un tour sur Internet, les pages de You Tube par exemple regorgeant de vidéos de paquebots dans la tempête. En voici une prise en 2011 sur le Carnival Pride (292 mètres, 90.000 GT), un navire nettement plus gros que le Costa neoRomantica.

 

 

Débarquement à Savone au lieu de Marseille

Pour le reste, le Costa neoRomantica, face à la mauvaise mer et les réactions des passagers, s’est finalement dérouté vendredi sur Savone au lieu de rejoindre Marseille. Des navettes ont été mises en places par la compagnie entre les deux ports afin d’acheminer les passagers qui débarquaient et ceux qui allaient leur succéder sur la croisière suivante. Contrairement à ce qui a pu être dit, le navire n’a pas été remorqué dans le port italien. Il a simplement été assisté, comme c’est l’usage en cas de fort vent, d’un remorqueur pour l’entrée à Savone. Quant à savoir si le paquebot aurait du rester à Trapani au lieu d’affronter la tempête, après vérification, aucune contrindication n’a été émise par les autorités et, une fois de plus, un bateau comme celui-ci est conçu pour affronter de telles conditions, même si lorsque c’est possible - ce qui n’est pas le cas ici – les paquebots contournent le mauvais temps pour le confort des passagers. Il convient aussi de dire que si la compagnie, cette raison, avait décidé d’ajourner le départ de Sicile, le Costa neoRomantica ne serait pas arrivé à l’heure pour cette fin de croisière, entrainant des problèmes pour de nombreux passagers ayant des post-acheminements. Avions et trains ratés, billets non remboursés à racheter… Cela aurait été à coup sûr le scandale ! 

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