La consolidation de l’industrie de la croisière se poursuit avec l’intégration, au sein du groupe américain Norwegian Cruise Line, de Regent Seven Seas Cruises et Oceania Cruises. Les deux compagnies appartiennent à la holding Prestige Cruises International, qui doit être rachetée par NCL pour un montant de 3.025 milliards de dollars. Un accord final en ce sens a été annoncé le 2 septembre. Grâce à cette fusion, NCL conforte durablement sa position de numéro 3 mondial du secteur puisque l’armateur va aligner, après avoir absorbé Prestige, 21 navires pour une capacité en base double de 40.952 lits (dont 6442 provenant des 8 navires Prestige). S’y ajoutent 5 paquebots en commande (quatre unités du type Breakaway Plus et le Seven Seas Explorer) pour des livraisons programmées d’ici la fin 2019.
Plus de 4 milliards de revenus au premier semestre
En matière de chiffre d’affaires, NCL, qui a généré 2.84 milliards de dollars au premier semestre de cette année, dépasse la barre des 4 milliards de dollars avec l’intégration de Regent et Oceania. L’excédent brut d’exploitation cumulé est supérieur au milliard de dollars (contre 754 millions pour NCL seul), alors que le revenu moyen quotidien par passager (yeld net) augmente sensiblement, en passant de 186 à 219 dollars. Il s’agit donc d’une excellente opération pour NCL, qui a d’ailleurs été saluée par les marchés boursiers, le titre enregistrant, à la bourse de New York, une forte hausse suite à l’annonce du rachat de Prestige.

Le Norwegian Getaway, livré cette année à NCL (© MEYER WERFT)
Actionnaire commun depuis 2007
Ce rapprochement est assez logique dans la mesure où les sociétés avaient un actionnaire commun : Apollo Management. A l'été 2007, le fonds d’investissement américain avait acquis pour 1 milliard de dollars la moitié de NCL, qui était détenu en totalité par le groupe asiatique Star Cruises suite à une OPA lancée à l’occasion de sa première entrée en bourse en 1999. Coté de nouveau en janvier 2012, NCL est aujourd’hui détenu à 20% par Apollo et 36% par Star Cruises, le reste des actions étant sur le marché.
Oceania et Regent ont, pour leur part, été rachetées en 2007 par Apollo, qui a déboursé près de 2 milliards de dollars pour s’offrir ces deux compagnies alors indépendantes et les regrouper au sein d’une holding, Prestige Cruises International. Alors qu’Oceania est positionnée sur le segment premium +, Regent est l’un des grands noms du luxe en mer. L’autonomie des deux marques sera préservée alors que Franck del Rio, sous l’impulsion duquel Oceania a été créé en 2002 et qui est l’actuel président de Prestige, doit garder son poste. NCL entend cependant développer des synergies au niveau de la flotte, par exemple en matière d’achats et d’avitaillements, afin de réaliser des économies d’échelle sur ses différentes filiales.

Le Seven Seas Voyager (© RSSC)
Se renforcer face à la concurrence
L’intégration de Prestige et ses filiales au sein de NCL va permettre à Oceania et Regent de s’appuyer sur un grand groupe pour assurer leur développement en bénéficiant d’une force de frappe bien plus importante, tant sur le plan financier que commercial. Une excellente nouvelle pour Oceania, notamment, qui va devoir faire face à la concurrence frontale que lui opposera à partir de l’an prochain Viking Ocean Cruises sur le marché américain. Positionnée sur le même segment de marché, la nouvelle compagnie maritime de Viking River Cruises, leader mondial des croisières fluviales, va prendre livraison de ses trois premiers navires entre le printemps 2015 et l’été 2016.
Le haut de gamme sous la bannière des grands groupes
Désormais, la quasi-totalité des principales compagnies travaillant sur le segment haut de gamme du marché de la croisière appartiennent à de grands groupes, avec Regent et Oceania chez NCL, Hapag-Lloyd chez TUI AG, Seabourn chez Carnival, Crystal chez NYK et Azamara chez Royal Caribbean. En dehors de certains opérateurs de niches, il n’y a guère que Silversea à demeurer seule. Un rachat de la compagnie italienne, basée à Monaco, par le groupe suisse MSC est évoqué depuis plusieurs années mais n’a jamais vu le jour.
Malgré le contexte économique encore difficile en Europe et la forte concurrence entre opérateurs, qui se traduit par d’importantes promotions, les croisières haut de gamme se portent plutôt bien, avec un intéressant renouvellement de l’offre ces dernières années. Seabourn, Hapag-Lloyd, Silversea et Oceania ont mis en service de superbes unités et les investissements se poursuivent, avec de nouvelles commandes chez Seabourn et Regent. Et cette tendance devrait se poursuivre avec l'élévation générale du standard proposé sur les navires.

Le Norwegian Epic (© NCL)
Le redressement spectaculaire de NCL
Quant à Norwegian Cruise Line, cette opération vient couronner un redressement spectaculaire débuté il y a six ans. En difficulté à la fin des années 2000 suite à différentes erreurs, à commencer par le lancement sur le marché US de NCL America, qui plomba ses comptes, mais aussi le projet Freestyle 3, trop ambitieux et complexe à l’époque, la compagnie a été restructurée suite à la prise de participation d’Apollo Management. Artisan du renouveau, Kevin Sheehan, à la barre depuis 2008, a su remettre la société sur les rails et assurer son retour à la profitabilité. Alors qu’au moment de son arrivée, les banques refusaient de financer de nouveaux projets vu les très mauvais résultats de NCL et son fort endettement, le nouveau patron a pu, grâce au redressement des comptes et le retour des bénéfices, relancer les investissements fin 2010. Depuis, deux grands paquebots (Norwegian Breakaway et Norwegian Getaway) ont été livrés, quatre unités légèrement plus grandes devant rejoindre la flotte entre 2015 et 2019.