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C’est l’heure de la campagne américaine pour une partie du groupe aérien embarqué (GAé) du Charles de Gaulle. Alors que le porte-avions français, en refonte depuis plus d’un an, sera prochainement remis à l’eau, ses appareils partent pour les Etats-Unis dans le cadre de la mission Chesapeake. En attendant le retour à la mer, normalement cet été, du bâtiment amiral de la flotte française, cette mission américaine vise à maintenir les compétences du GAé, qui faute d’un second porte-avions pour s’entrainer et se qualifier pendant les indisponibilités du Charles de Gaulle, passe pour la seconde fois par cette alternative. Elle est indispensable pour que les marins retrouvent leurs réflexes en conditions réelles et soient prêts pour le retour du Charles de Gaulle, en plus des entrainements déjà réalisés, comme les appontages simulés sur piste (ASSP) ou encore les simulations de manoeuvres sur un tracé figurant le pont d'envol du bâtiment. 

 

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© Florent Le Bihan/Marine Nationale/Défense

Le pont d'envol du CDG tracé sur la piste de Landivisiau fin 2017 (© : MARINE NATIONALE - FLORENT LE BIHAN) 

 

Cette campagne va bénéficier non seulement aux pilotes de Rafale Marine et d’Hawkeye (ils sont 27, dont 5 vont faire leur premier appontage aux commandes d’un Rafale), mais aussi à l’ensemble des équipes mettant en oeuvre les aéronefs sur porte-avions, comme les techniciens des flottilles et le personnel du pont d’envol. S’y ajoutent des membres du centre d’expertise du GAé (CENTEX GAé), qui assure le soutien des flottilles dans les domaines de l’instruction, de la préparation et l’analyse des missions.

 

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© Florent Le Bihan/Marine Nationale/Défense

(© : MARINE NATIONALE - FLORENT LE BIHAN) 

 

Sauts de puce pour l’E-2C et ravitaillements en vol pour les Rafale

Dans cette perspective, 350 marins et 13 appareils français sont en route pour les Etats-Unis. Il y a là l’un des trois avions de guet aérien Hawkeye de la flottille 4F, basée à Lann-Bihoué (Morbihan). Pour rallier la base aéronavale américaine de Chambers, située dans l’arsenal de Norfolk, l’appareil, qui est parti hier, emprunte la « route nord », passant par l’Ecosse, l’Islande, le Groenland et le Canada. Plusieurs ravitaillements ont été organisés au sol, dans différentes bases, l’Hawkeye français ne pouvant pas être ravitaillé en vol.

 

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© MARINE NATIONALE

Hawkeye (© : MARINE NATIONALE) 

 

Stationnés à Landivisiau, dans le Finistère, 12 Rafale Marine (sur les 42 en parc), appartenant aux trois flottilles de chasse de l’aéronautique navale (11F, 12F et 17F), s’envolent quant à eux à partir d’aujourd’hui. Ils empruntent la « route sud », passant par les Açores, où ils vont s’arrêter avant de repartir pour rallier d’une traite les Etats-Unis grâce à des ravitaillements en vol assurés par l’armée de l’Air, qui mobilise pour ce convoyage trois KC 135. Accueillis par le Carrier Air Wing 8 de l’US Navy, les Rafale M arriveront sur la base aéronavale d’Oceana, située près de Norfolk.

 

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© MER ET MARINE- VINCENT GROIZELEAU

Rafale Marine sur un porte-avions américain, ici en 2008 (© : MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU) 

 

Une phase à terre et un embarquement sur l’USS George H. W. Bush

Prévu pour s’achever fin mai, ce déploiement aux USA va se décomposer en deux grandes périodes. Une première phase, à terre, doit durer du 5 avril au 8 mai. Elle comprendra notamment des appontages simulés sur piste (ASSP), destinés rappelle la Marine nationale « à permettre aux pilotes de répéter les manoeuvres à entreprendre lors de la phase critique de l’appontage et garantir ainsi un très haut niveau de sécurité. Chaque pilote doit réussir 8 ASSP, de jour et de nuit avant de pouvoir passer les qualifications à l’appontage sur porte-avions ».

La seconde phase du déploiement se déroulera en effet à la mer, à bord du porte-avions USS Georges H. W. Bush. Le groupe aérien français y embarquera du 8 au 18 mai. « Lors des premiers jours de mer, consacrés à la montée en puissance du groupe aérien mixte (US Navy / Marine nationale), des exercices enchainés de catapultages et d’appontages seront réalisés, prérequis nécessaires à chaque pilote afin qu’il soit apte à opérer depuis un porte-avions. Chaque pilote doit réussir 10 appontages sur un porte-avions de jour et de nuit pour obtenir sa qualification ».

 

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© US NAVY

Le porte-avions USS George H. W. Bush (© : US NAVY) 

 

180 exercices en 7 semaines

Pendant toute la durée du déploiement, plus de 180 exercices et entrainements en vol, conjoints avec les Américains, permettront aux marins des deux nations de travailler à un haut niveau d’interopérabilité. « De nombreuses missions sont planifiées avec des objectifs toujours plus ambitieux, permettant de balayer le large spectre des savoir-faire des pilotes de chasse embarquée : soutien des troupes au sol, attaque ou défense de bateaux, recherche de cibles, bombardement, combat aérien avec nombre d’avions variable – 1 contre 1 ou attaques multiples, défense de zone et protection de raid dans la profondeur, etc. A terre comme en mer, ces missions complexes seront menées quotidiennement, tout en s’attachant à mécaniser les actions spécifiques liées à la mise en oeuvre depuis un pont d’envol (catapultage, appontage, retour de mission en circuit porte-avions, de jour comme de nuit) ».

Pour ces 7 semaines consécutives d’entrainement, la marine a prévu 430 vols sur Rafale M et 40 vols sur Hawkeye.

Chesapeake en hommage à la victoire de 1781

Cette mission a été baptisée Chesapeake, en référence à la bataille au cours de laquelle la flotte française, commandée par l’amiral De Grasse, a battu l’escadre britannique de Thomas Graves. Obtenue le 5 septembre 1781, cette victoire fut cruciale pour le dénouement de la guerre d’indépendance américaine, la Royal Navy étant dès lors empêchée de ravitailler et secourir l’armée britannique de Cornwallis, retranchée à Yorktown. Ce dernier devra ainsi se rendre au général Washington, les insurgés américains étant pour mémoire aidés par les corps expéditionnaires de La Fayette et Rochambeau.

 

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© US NAVY

Sur l'USS Theodore Roosevelt en 2008 (© : US NAVY) 

 

Un premier Rafale sur porte-avions US en 2007

Alors que les pilotes français connaissent bien les porte-avions américains, sur lesquels ils effectuent leurs premiers appontages et catapultages dans le cadre de la phase initiale de leur formation, les premières manœuvres de Rafale Marine sur un « carrier » de l’US Navy se sont déroulées en 2007 à bord de l’USS Enterprise. Depuis, des appontages et catapultages sont régulièrement conduits, avec une réciproque du F/A-18 sur le Charles de Gaulle à partir de 2014.

Concernant Chesapeake, c’est la seconde fois que l’aviation embarquée française se rend ainsi aux Etats-Unis dans le cadre du maintien de ses compétences. La première campagne avait eu lieu à l’été 2008, lors du premier arrêt technique majeur du Charles de Gaulle. Mais il n’y avait alors que six Rafale Marine de la 12F et deux Hawkeye de la 4F. Ces huit appareils avaient embarqué pendant cinq jours à bord de l’USS Theodore Roosevelt.

Une interopérabilité au plus haut niveau

Cette fois, l’ampleur de la mission est donc bien plus importante, ce que le renforcement constant de l’interopérabilité entre les deux marines depuis 10 ans permet aujourd’hui. Les états-majors ont d’ailleurs l’intention, grâce à ce déploiement, d’aller encore un peu plus loin avec ce groupe aérien mixte sur l’USS George H. W. Bush : « Ce déploiement est également l’opportunité d’entretenir la capacité de la Marine nationale à opérer aux côtés de ses alliés américains et à maintenir le haut niveau de confiance mutuelle déjà atteint sur des théâtres d’opérations communs. Le niveau d’exigence des missions exécutées ira crescendo afin d’atteindre une interopérabilité complète et conduire, de concert, l’ensemble du spectre des missions dévolues aux aéronefs embarqués ».

 

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© MARINE NATIONALE

Le Charles de Gaulle en 2016 (© : MARINE NATIONALE) 

 

Remontée en puissance du Charles de Gaulle

De retour des Etats-Unis, les personnels engagés enchaîneront avec la remontée en puissance du Charles de Gaulle. Entré en cale sèche à Toulon en février 2017 dans le cadre de sa refonte à mi-vie, pilotée par Naval Group, le bâtiment, une fois sorti de cale sèche et l’ensemble de ses installations remises en route, partira pour ses essais de fin de chantier. Une fois ceux-ci menés à bien, l’équipage s’entrainera puis le bâtiment recevra de nouveau ses appareils. Il remontera ainsi progressivement en puissance, en intégrant progressivement toutes les composantes du groupe aéronaval (frégates, sous-marin, ravitailleur, patrouille maritime…) et l’état-major embarqué.

 

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© MARINE NATIONALE

Rafale Marine en Jordanie en 2017 (© : EMA) 

 

Les flottilles sont restés actives depuis la fin 2016

Depuis le dernier retour de déploiement du porte-avions français, fin 2016, on notera que les avions du GAé ont participé à différents exercices, comme le Tiger Meet de l’OTAN accueilli à Landivisiau en juin dernier, mais aussi à des missions opérationnelles, y compris de combat. Ainsi, en 2017, les flottilles de chasse de la Marine nationale ont participé, aux côté de l’armée de l’Air, durant 6 mois, aux opérations contre Daech depuis la base aérienne projetée au Levant (Jordanie)

Les avions ont également mené l’an dernier et début 2017, à Landivisiau, des « carriers weeks ». Ces entrainements sont dédiés à la mise en oeuvre du matériel et des procédures pour les pilotes et l’ensemble du personnel du pont d’envol concerné par les manoeuvres aviations. S’y sont ajoutés plusieurs sessions d’ASSP.

 

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© Florent Le Bihan/Marine Nationale/Défense

Carrier Week à Landivisiau en novembre 2017 (© : MARINE NATIONALE - FLORENT LE BIHAN) 

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© Florent Le Bihan/Marine Nationale/Défense

Carrier Week à Landivisiau en novembre 2017 (© : MARINE NATIONALE - FLORENT LE BIHAN) 

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© MARINE NATIONALE

Carrier Week à Landivisiau en novembre 2017 (© : MARINE NATIONALE - FLORENT LE BIHAN) 

 

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