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Alors que l’Europe tergiverse quant à un éventuel renforcement des sanctions à l’encontre de la Russie au moment où la situation semble s’améliorer en Ukraine, le programme des BPC russes continue de cristalliser l’attention. Le premier de ces deux bâtiments de projection et de commandement réalisés à Saint-Nazaire n’a pas, comme prévu, appareillé le 10 septembre. Le Vladivostok doit, en fait, réaliser d’ici sa livraison deux ultimes sorties en mer d’une durée de 10 jours chacune dans le cadre de la formation de son futur équipage, mais aussi des marins qui mettront en œuvre son sistership, le Sevastopol (Sébastopol). Ce dernier, toujours en cours de construction dans la grande forme de STX France, doit être mis à l’eau le mois prochain et livré en 2015. Quant à son aîné, sa remise à la marine russe est programmée fin octobre.

 

Les yeux rivés sur Ukraine

 

Une date qui a néanmoins été conditionnée par le président français à l’évolution de la situation en Ukraine. François Hollande pose deux conditions pour autoriser la livraison du Vladivostok : la mise en œuvre effective d’un cessez-le-feu entre les forces de Kiev et les séparatistes pro-russes, ainsi que la mise en place d’un accord politique permettant d’assurer la paix dans la région. De ce point de vue, les choses semblent s’orienter favorablement puisque le président ukrainien a annoncé hier que les trois quarts des troupes russes présentes dans l’Est du pays avaient quitté le territoire. Quant à la trêve, qui dure depuis six jours, elle parait peu ou prou respectée.  On semble donc aller vers la désescalade, Kiev promettant aux provinces de l’Est une plus grande autonomie. Reste maintenant à savoir si cette proposition sera suffisante pour satisfaire les séparatistes et Vladimir Poutine, qui accuse les Occidentaux de profiter de la crise ukrainienne pour faire renaître l’OTAN dans sa configuration guerre froide.

Les chancelleries européennes demeurent restent encore très prudentes, même si tout le monde espère que les avancées de ces derniers jours vont se traduire par une solution durable permettant d’apaiser les tensions avec la Russie. Car, au-delà de la logique politique et diplomatique des pressions exercées sur Moscou par l’Europe, qui entend maintenir la paix à ses frontières, il est bien évident que le rapport de force actuel n’est profitable à personne, notamment sur le plan économique. Surtout que la Russie réplique aux sanctions européennes.

 

 

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© DROITS RESERVES

Le Vladivostok lors de sa première sortie en mer, en mars (© : DR)

 

Pourquoi la France, sans énorme surprise, livrera les bateaux... 

 

Dans ce contexte, l’achèvement du premier des deux BPC commandés par la Russie à la France en 2011 intervient au pire moment. Face à ses alliés, qui sont nombreux à exiger depuis des mois la suspension voire l’annulation du contrat, Paris a été obligée de donner des gages en posant des conditions à la livraison du Vladivostok. Mais il est évident que la France a bien l’intention de livrer les BPC russes, sauf évidemment si Moscou franchissait des lignes rouges obligeant François Hollande à prendre une décision qu’il souhaite probablement éviter à tout prix. Suspendre et encore pire annuler le contrat pourrait, en effet, avoir des conséquences désastreuses sur les ventes de matériels militaires français à l’export, puisqu’une telle initiative serait perçue (et exploitée par les concurrents des industriels tricolores) comme une remise en cause de la parole de la France et de sa capacité à respecter ses engagements. L’Etat se verrait d’autre part contraint de reprendre les bateaux et de verser des milliards d’euros de pénalités à la Russie, une somme qu’il faudrait prélever sur un budget qui ne souffre  aujourd’hui d’aucune marge de manœuvre, comme on peut le voir avec le nouveau dérapage des déficits annoncé cette semaine par Bercy.

 

Ultimes sorties d’entrainement dans les prochaines semaines

 

C’est pourquoi, à Paris, on croise probablement les doigts pour que le début d’accalmie constaté en Ukraine se confirme et, qu’ainsi, la France puisse se sortir sans trop de dommages du guêpier des BPC russes. En attendant, le travail continue à Saint-Nazaire, où la construction du Sevastopol se poursuit normalement. Quant au programme de formation des 400 marins russes arrivés cet été dans l’estuaire de la Loire, est-il en train de subir le jeu politique entre Occidentaux et Russes ? Les raisons du report de la prochaine sortie en mer du Vladivostok sont elles diplomatiques ou techniques ? Officiellement, il n’y a pas de réponse. Aujourd’hui, le 13 septembre, c'est-à-dire demain, est avancé comme nouvelle date pour le départ en essais du navire, qui doit manœuvrer une dizaine de jours au large des côtes bretonnes afin de former son équipage. Et il faudra aussi, logiquement, procéder à un moment ou à un autre aux essais d’enradiage des quatre chalands de débarquement réalisés par STX Lorient. 

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