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Le casque est vissé sur les oreilles. Au loin, dans le matin un peu gris breton, on l'entend quand même arriver. 600 pieds/minutes pour la descente, 140 noeuds de vitesse, les yeux rivés sur le miroir d'appontage qu'il aligne sur le repère de son viseur tête haute, le pilote de Rafale va faire crisser ses pneus sur le bitume de la piste de Lann-Bihoué. Touch and go, un petit coup de post-combustion, l'avion repart comme il est venu. A toute vitesse. Rafale (© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ) Ce matin, sur la piste de la base aéronavale de Lann-Bihoué, cinq Rafale et un Hawkeye effectuent des appontements simulés sur piste (ASSP). « En mars, ils embarquent sur le porte-avions, et dans cette perspective, les pilotes doivent s'entraîner, explique le capitaine de vaisseau Patrick Zimmermann, commandant la base aéronavale de Landivisiau, alors depuis quelques semaines, les campagnes d'ASSP sont organisées sur les bases de Landivisau, de Lann-Bihoué et bientôt d'Istres, ce qui nous permet de répartir la gêne sonore pour les riverains ». Un entraînement crucial, « à la fois pour la dizaine de jeunes pilotes que nous sortons chaque année, mais également pour les pilotes confirmés ». Rafale Marine(© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ) Hawkeye(© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ) Pour l'appontage, pas de simulateur, que de l'entraînement Evidemment, à Lann-Bihoué on n'est pas exactement sur le pont du porte-avions. « C'est sûr, il n'y a pas les mouvements du navire ou surtout les conditions de vent très spécifiques du porte-avions avec d'abord le mouvement d'aspiration, puis la « dégueulante » à l'arrière du pont et enfin le mouvement d'ascendance. En revanche, les pilotes s'entraînent à la précision en visant un carreau équivalent à la piste d'appontage du Charles-de-Gaulle », précise le capitaine de vaisseau Christophe Lucas, commandant la base de Lann-Bihoué. « Et puis, on pourra faire ce qu'on veut, il ne pourra jamais y avoir un simulateur d'appontage. Il n'y a que l'entraînement en conditions réelles qui vaille ». Au bord de la piste, il y a les officiers d'appontage. Les trois hommes sont tous pilotes confirmés. A bord du porte-avions, ce sont eux qui guident l'avion à son arrivée. « Il faut établir avec le pilote un lien de confiance absolu, il faut qu'il nous obéisse presque au doigt et à l'oeil, et ils le savent. Quand il fait beau et que tout va bien, ils n'ont pas besoin de nous. En revanche, quand il fait nuit et que les conditions sont difficiles, c'est nous qui les guidons pour qu'ils puissent revenir sans encombre». Et l'on sent bien que les ASSP sont aussi faits pour cela. Les officiers d'appontage(© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ) « Le crash contrôlé » Les Rafale se succèdent, toutes les 45 secondes. « C'est à peu près le rythme sur le porte-avions, tout est cadencé à la minute, nous respectons ces conditions ici aussi ». Un avion touche la piste, les deux commandants ne peuvent s'empêcher de commenter, avec un regard gourmand, la manoeuvre. « Là, à l'avant de l'avion, il y a une lumière, c'est l'indicateur d'incidence. Quand c'est vert tout va bien, quand il est rouge, l'avion est trop cabré et quand il est ambre, c'est qu'il est trop pointé. L'officier d'appontage l'indique au pilote qui du coup peut ajuster son incidence pour apponter. Il faut bien se rendre compte que l'appontage, c'est une sorte de crash contrôlé. On arrive très vite sur une surface de la largeur d'un terrain de tennis. On travaille à 10% de la vitesse de décrochage, là où les vols commerciaux sont à 30%. On ne fait pas d'arrondi (ndlr : il s'agit du fait de remonter le nez de l'avion avant l'atterrissage), l'avion doit, au cas où, pouvoir remettre plein gaz pour immédiatement repartir. » Sur le tarmac de Lann-Bihoué, les traces de pneus laissées par les avions se superposent. L'officier d'appontage est content, « elles sont toutes bien au milieu, ils sont très précis ». Dans quelques semaines, le porte-avions reprend la mer. « Ils seront prêts ». (© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ) (© : MER ET MARINE - CAROLINE BRITZ)

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