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C’est une véritable révolution qu’est en train de vivre la guerre des mines, avec l’introduction de nouveaux systèmes totalement automatisés qui vont changer radicalement les concepts d’emploi et l’accessibilité des marines à cette capacité stratégique…

 

Alors que la majorité du commerce mondial passe par la mer, les détroits et chenaux d’accès aux ports sont des zones stratégiques pouvant être facilement bloquées par l’emploi de mines ou d’engins explosifs improvisés (IED) sous-marins. Domaine de lutte complexe, qui fait appel à des moyens techniques et un savoir-faire humain très pointu, la guerre des mines évolue de manière significative. L’heure est au développement de solutions robotisées afin, notamment, de limiter au maximum la présence humaine dans les zones de danger. Pour cela, des systèmes de drones sont mis au point afin de détecter, classifier, localiser, identifier puis neutraliser les menaces sous-marines. Mondialement réputée pour son savoir-faire dans le domaine de la guerre des mines, la France est très en pointe sur le sujet. Dans le cadre de la préparation du programme SLAMF (Système de lutte anti-mine futur), destiné à assurer la succession des actuels chasseurs de mines de la Marine nationale, la Direction Générale de l’Armement (DGA) a lancé en 2009 l’étude ESPADON, toujours en cours.

 

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© MICHEL FLOCH

Le Sterenn Du (© : MICHEL FLOCH)

 

Des drones porte-drones

 

Elle vise à évaluer la faisabilité d’un concept basé sur des drones de surface (USV), lancés depuis un bateau-mère vers la zone de recherche et capables, une fois sur place, de déployer et récupérer de manière autonome un sonar remorqué et différents drones sous-marins (AUV, ROV). Le projet implique DCNS et Thales, mais aussi ECA Robotics, le grand spécialiste français des drones sous-marins, qui propose la gamme d’AUV Alister ainsi que le ROV K-Ster, de type Mine Killer. Pour les besoins d’ESPADON, ECA Robotics a développé plusieurs drones, dont un pour la détection, la classification et la localisation, dit AUV DCL. Cet engin, doté d’un sonar latéral SAMDIS de Thales, est chargé de quadriller de vastes zones à la recherche de menaces potentielles. Un second drone est ensuite mis en œuvre pour procéder à l’identification de l’engin découvert.  Doté d’un sonar haute résolution et de quatre caméras offrant plusieurs angles de vue, cet AUV I a été développé sur la base de l’Alister 18 Twin. A terme, un système de sonar suffisamment précis pourrait voir le jour pour compléter les caméras, qui présentent le désavantage d’être inutilisables si l’eau est trop trouble.

 

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© MARINE NATIONALE

L'AUV I développé sur la base de l'Alister 18 Twin (© : ECA ROBOTICS)

 

Ces moyens, ainsi qu’un sonar remorqué à antenne synthétique de Thales, sont mis en œuvre par un USV spécialement conçu pour cette expérimentation. Mis à l’eau en 2010, le Sterenn Du est un catamaran de 25 tonnes, long de 17 mètres et large de 7.5 mètres. Il est doté de systèmes de lancement et de récupération automatique. L’un d’eux a été conçu par ECA, qui l’a breveté. Ce dispositif critique est composé d’un portique, qui déploie et récupère une cage sous-marine dans laquelle vient se loger l’AUV. Ce portique dispose d’un système d’amortissement qui permet de stabiliser la cage par des mers formées et, ainsi, faciliter la rentrée de l’AUV. Alors que l’USV doit pouvoir travailler dans des conditions météo difficiles, les AUV, au retour de mission, détectent avec un sonar et les algorithmes spécialement développés par ECA le câble d’accroche leur permettant de pénétrer dans la cage et, ainsi, d’être récupérés.

 

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© ECA ROBOTICS

AUV I à bord du Sterenn Du (© : ECA ROBOTICS)

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© MARINE NATIONALE

AUV I à bord du Sterenn Du (© : ECA ROBOTICS)

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© ECA

Le système de mise à l'eau (© : ECA ROBOTICS)

 

La faisabilité du concept validée par ESPADON

 

Les nombreux tests menés ces quatre dernières années grâce à ESPADON ont permis de vérifier la faisabilité d’un concept innovant de système de guerre des mines basé sur l’emploi combiné d’USV et d’AUV. Le Sterenn Du s’est parfaitement comporté en mode télé-opéré et a pu mettre à l’eau de manière autonome et jusqu’à mer 4 son sonar remorqué et l’AUV I, qui ont tous deux donné satisfaction. Quant à l’AUV DCL, après des essais concluants avec un premier engin, le nouveau drone développé pour ce programme, prévu pour être testé avec l’industrie jusqu’au printemps 2015, offre des performances nettement accrues au niveau du sonar, du système de traitement associé et de l’autonomie (30 heures).

 

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© DR

 

Il restera enfin une ultime étape, celle de la neutralisation, avec le déploiement depuis l’USV de Mine Killers, des robots télé-opérés dotés d’une charge et se faisant exploser au contact de la mine. Ces ROV peuvent être des K-Ster, qui présentent la particularité d’être équipés d’une tête pivotante permettant d’optimiser l’angle de visée en présence de courants marins.

 

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© ECA ROBOTICS

Le Mine Killer Kster (© : ECA ROBOTICS)

 

Transmissions de données

 

En matière de transmissions de données, les AUV, après avoir balayé le fond marin, remontent à la surface pour transférer leurs images vers le bateau-mère ou le Sterenn Du, qui sert alors de relais, au moyen d’ondes hertziennes. Les ondes acoustiques sont également utilisées pour communiquer avec les AUV, mais elles ont une portée de quelques km seulement et servent donc uniquement à connaitre les paramètres des drones (position, charge de la batterie, phase de la mission…) et les reconfigurer en cours de mission. Le débit reste aujourd’hui trop faible pour la transmission en temps réel d’images sonar ou vidéo. 

Au niveau du rayon d’action, l’USV devrait pouvoir être déployé à une vingtaine de nautiques du bateau-mère et les AUV à une dizaine de nautiques de l’USV, permettant au bâtiment de rester loin de la menace, ce qui est aussi un avantage tactique, par exemple pour éclairer discrètement une zone en amont d’un débarquement.

 

Premier système opérationnel à l’horizon 2020

 

Les travaux menés dans le cadre d’ESPADON se poursuivront au-delà de 2015, la DGA, les industriels et la marine française souhaitant approfondir leurs connaissances et commencer à élaborer de futurs concepts d’emploi. Les essais menés par ce prototype serviront, en outre, à alimenter le futur programme SLAMF, qui doit faire l’objet d’une coopération franco-britannique en vue de la livraison d’une première capacité opérationnelle à l’horizon 2020.  

Au-delà des besoins nationaux, cette technologie sera également proposée à l’export, avec la possibilité de déployer des systèmes plus légers. Des solutions existent pour les USV avec le recours à des semi-rigides dronisés, comme l’Inspector d’ECA Robotics, un engin de 8.4 mètres capable de mettre en œuvre des capteurs acoustiques ainsi que des engins télé-opérés. Une compacité qui ouvre la voie à l’adaptation de tels systèmes sur des plateformes polyvalentes, comme des OPV. 

 

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© ECA ROBOTICS

Le nouvel Inspector mettant à l'eau un Kster (© : ECA ROBOTICS)

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© ECA ROBOTICS

L'Inspector embarquant des Kster (© : ECA ROBOTICS)

 

 

 

 

 

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