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L’épave du San Juan a été localisée et identifiée vendredi 16 novembre, un an après la disparition du bâtiment et de ses 44 membres d’équipage au large de la côte atlantique argentine. Cette découverte est le fruit des recherches conduites par les robots sous-marins (AUV) mis en œuvre depuis le Seabed Constructor, navire opéré par la société privée Ocean Infinity. Celle-ci, mandatée par les autorités argentines pour retrouver le San Juan, avait débuté ses investigations des fonds marins début septembre à 300 milles à l’est de Comodoro Rivadavia. Les opérations devaient cesser et ne reprendre qu’en février après un arrêt technique du navire mais la compagnie a décidé de faire une nouvelle recherche vendredi soir sur un contact nommé "point d'intérêt 24". C'est au cours de cette mission que l'un des AUV (des Hugin capables de plonger à 6000 mètres) du Seabed Constructor est tombé sur l’épave du San Juan, située à 800 mètres de profondeur.

 

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© OCEAN INFINITY

Image d'archive du Seabed Constructor et de l'un de ses AUV Hugin 6000 à la mer (© : OCEAN INFINITY)

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© OCEAN INFINITY

Image d'archives des AUV Hugin 6000 à bord du Seabed Constructor (© : OCEAN INFINITY)

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© MARINE TRAFFIC

Le Seabed Constructor recherchait depuis septembre l'épave au large de Comodoro Rivadavia -

Ici la position du navire le 02/11/18 (© : MARINE TRAFFIC)

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© MARINE ARGENTINE

La marine argentine annonçait hier soir une plongée sur le point d'intérêt 24 (© : MARINE ARGENTINE)

 

Problème signalé lors d’une ultime communication

Le sous-marin argentin a, pour mémoire, disparu le 15 novembre 2017 après un ultime contact avec la terre. Il se situe alors à environ 400 kilomètres des côtes. Le commandant fait état d’un problème sur les batteries et d’un court-circuit. Mais le bâtiment est d'après les autorités argentines encore en état de naviguer. Décision est alors prise de faire directement rentrer le San Juan vers sa base de Mar del Plata, au sud-est de Buenos Aires. Il n’y arrivera jamais et ne donnera plus signe de vie. Malgré le déploiement de très importants moyens maritimes et aériens par l’Argentine et une douzaine d'autres pays, les recherches, menées sur une vaste zone de plus de 480.000 km²,  étaient restées vaines.

L’implosion détectée par un réseau de surveillance acoustique

Le même jour que la dernière communication, une anomalie acoustique violente avait été détectée au large des côtes atlantiques, 3 heures après la dernière communication du sous-marin. Une anomalie détectée par le réseau de surveillance acoustique de l’organisation du traité d’interdiction complète des essais nucléaires (OTICE), apparentée aux Nations Unies et basée à Vienne. En janvier 2018, le Bureau américain du renseignement naval avait affirmé que cette anomalie correspondait à la destruction de la coque du San Juan, qui aurait implosé à 400 mètres de profondeur. L’implosion a selon les experts américains libéré « une énergie équivalente à l'explosion de près de 6 tonnes de TNT », provoquant une destruction immédiate, en seulement « 40 millisecondes ». Le rapport du Bureau du renseignement naval en avait conclu que, si l’équipage du San Juan pouvaient avoir conscience que la fin était proche, les marins n'ont pas eu le temps de comprendre ce qui se passait : « ils n'ont pas souffert. La mort a été instantanée ». 

Le mystère des derniers moments

Une affirmation à tempérer car on ne sait pas quelle était la situation du sous-marin avant son implosion. Pour descendre inévitablement vers le fond (sur une durée que l'on ne connait pas) sans pouvoir remonter à la surface malgré les dispositifs de secours, il a fallu une avarie majeure à bord. Lors de la dernière communication avec la terre, le commandant avait donc évoqué un problème avec les batteries. Ces équipements sensibles et qui ont déjà été responsables d’accidents, sont peut-être en cause, mais le naufrage peut avoir d'autres origines et être devenu inévitable suite à l’accumulation de sinistres multiples. Intervenu après la dernière communication - au cours de laquelle le sous-marin faisait certes état d’un problème mais n’était semble-t-il pas encore en situation de péril immédiat - l’évènement fatal ayant entrainé la perte du San Juan a pu tuer une partie de l'équipage avant la destruction totale de la coque. Explosion, incendie, voie d'eau, peut-être tout en même temps... certains marins ont pu mourir brûlés, asphyxiés ou noyés.

L’enquête va se poursuivre avec l’inspection de l’épave

La découverte de l’épave, dont on ne connait pas encore l’état exact mais qui est sans doute particulièrement dégradée et dont des éléments sont probablement disséminés au fond de l’océan, est en tous cas un évènement très important. D’abord pour les familles des marins disparus et leur processus de deuil, mais aussi, bien entendu, pour l’enquête. « Maintenant, c'est un autre chapitre qui s'ouvre. À partir de l'analyse de l'état dans lequel se trouve le sous-marin, nous verrons comment nous procédons », a indiqué ce samedi le porte-parole de la marine argentine. L'épave va être minutieusement inspectée par les robots sous-marins, équipés de caméras, afin de trouver des éléments permettant de mieux comprendre ce qui s’est passé. Des investigations qui s’annoncent très difficiles. On ne sait pas encore si les autorités argentines tenteront de récupérer tout ou partie du sous-marin. 

 

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© MARINE ARGENTINE - GACETA MARINERA

Le San Juan (© : MARINE ARGENTINE)

 

Un bâtiment construit au début des années 80

Sistership du Santa Cruz, opérationnel depuis 1984 et avec lequel ils formaient le type TR1700, le San Juan a comme son aîné été construit en Allemagne. Mis en service en 1985, ce bâtiment de 66 mètres de long et 2264 tonnes de déplacement en plongée avait bénéficié d’un important chantier de modernisation en 2014. Malgré tout, les familles et la presse argentine ont critiqué depuis un le gouvernement pour le manque de moyens alloués à la maintenance des sous-marins.

La dernière mission du San Juan avait débuté un peu plus d’un mois avant le drame. Parti de Mar del Plata, le bâtiment avait navigué jusqu’à l’extrême sud de l’Amérique latine. Après une escale de quelques jours à Ushuaia, il était sur le chemin du retour lorsqu’il a coulé.

 

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