Le tribunal correctionnel de Marseille a condamné, hier, le capitaine de vaisseau Eric Delepoulle, ancien commandant de la frégate La Fayette, à un an de prison avec sursis et 10.000 euros d’amende pour harcèlement moral après le suicide son maître d’hôtel. Le tribunal n’a pas suivi les réquisitions du procureur qui demandait un an d’emprisonnement, éventuellement assorti de sursis et 6000 euros d’amende. En réparation civile, la mère de la victime, Martine Wancke, a obtenu 25.000 euros, son frère 10.000 euros et sa compagne 20.000 euros.
Un comportement critiqué par l'équipage
Le second-maître Sébastien Wanke, âgé de 32 ans, s’était pendu dans le coqueron le 15 juin 2010, alors que la frégate se trouvait au large de la Sicile. L’affaire s’est très vite focalisée sur le pacha du La Fayette, dont le comportement a été vivement critiqué par la majorité de son équipage. Au cours de l’instruction, rappelle l’AFP, les témoins ont évoqué une « ambiance exécrable » et des « pressions permanentes » de la part du commandant du La Fayette, présenté par certains comme le « bateau de l’enfer », avec selon le médecin du bord un pacha « se prenant pour Dieu ».
A la barre, le commandant Delepoulle, après avoir reconnu que, durant ses 18 mois de commandement, la vie à bord n’avait pas été « un long fleuve tranquille », s’était dit « très content » des services de son ancien maître d’hôtel et « très affecté » par son décès. Mais il conteste toute responsabilité dans ce drame, arguant qu'il n'avait pas connaissance du profond malaise régnant sur son bâtiment et se retranchant derrière la chaîne hiérarchique.
Un «officier brillant»
Présenté comme un « officier brillant », Eric Delepoulle avait, avant le La Fayette, été le pacha d’un patrouilleur outre-mer. Un premier commandement qui ne s’était apparemment pas extrêmement bien passé, aux dires des marins de l’époque. Quelques alertes sur son comportement étaient remontées jusqu’à l'Etat-major de la marine mais, probablement en raison de l’éloignement de cette affectation, les retours négatifs n’avaient pas eu d’impact sur la carrière de l’officier, qui a donc été par la suite nommé à la tête d’une frégate. Sitôt le drame connu, une enquête militaire a été diligentée. Celle-ci n’a pas pu déterminer la responsabilité d’Eric Delepoulle dans la mort Sébastien Wanke, mais a clairement mise en lumière le profond ressentiment de l’équipage à l’encontre du pacha, tous grades confondus. Au point que les autorités militaires ont estimé que l’officier ne devait en aucun cas se voir de nouveau confier un commandement à la mer.
La Marine nationale a indiqué hier que « cette condamnation, si elle était définitivement confirmée, caractériserait des faits qui justifieraient l’ouverture immédiate par le chef d’état-major de la Marine d’une procédure disciplinaire ».