En plus du nouveau Marjata IV, la marine norvégienne va finalement garder son prédécesseur, le Marjata III. Renommé Eger, ce bâtiment collecteur de renseignements, mis en service en 1993, sera exclusivement basé en mer de Barents. Face au regain d’activité de la flotte russe, il permettra de muscler les moyens de surveillance norvégiens et complètera le nouveau Marjata, baptisé en décembre 2014 et qui sera totalement opérationnel cette année après la mise en place de ses nombreux équipements. Celle-ci a été réalisée l’an dernier aux Etats-Unis, où le navire a reçu différents systèmes américains lors d’un passage de 7 mois à la base navale de Cheatham (Virginie), située près de Camp Peary, le fameux centre d’entrainement de la CIA plus connu sous le nom de « Ferme ».

Le Marjata IV dans la rivière York en novembre 2015 (© : WIKIPEDIA - AGOEKE)
Dans le domaine du renseignement, les relations sont en effet étroites entre les USA et la Norvège, membre de l’OTAN, voisine de la Russie et située à proximité des grandes bases de la flotte du Nord, qui donnent sur la mer de Barents. Il y a là le gros des bâtiments de surface russe, mais aussi la tanière de la plus importante composante de sous-marins nucléaires, positionnée dans la baie de Poliarny. Alors que les Occidentaux constatent un regain d’activité de la marine russe, mais aussi d’autres nations, comme la Chine, dans le cercle arctique, un renforcement des moyens de surveillance a été décidé. Les Américains ont, ainsi, entrepris d’accroitre le renseignement satellitaire dans cette zone, alors que les Britanniques ont annoncé une reprise des patrouilles de sous-marins d’attaque dans le grand nord. Le dispositif allié s’appuie en outre sur le réseau de détection et d’écoute canadien CFS Alert, ainsi que les capacités mises en œuvre par les Norvégiens, qui occupent une position géographique stratégique.

Le Marjata III près du porte-avions russe Kuznetsov (© : ETTERRETNINGSTJENESTEN)
C’est dans ce contexte, marqué par les tensions entre Moscou et les Occidentaux, que le Marjata IV entre en service. Construit par Vard (coque réalisée à Tulcea, en Roumanie, et achevée à Langsten, en Norvège), ce nouveau navire espion n’est pas armé par la marine mais directement par l’E-tjenesten, le Service de renseignement norvégien. Long de 126 mètres pour une largeur de 23.5 mètres, il est spécialement équipé pour la surveillance dans le grand nord. A cet effet, le navire met en œuvre d’importants moyens de guerre électronique de type ELINT (Electronic Signals Intelligence) afin de capter et analyser les renseignements d’origine électromagnétique. Par rapport à son aîné, le nouveau Marjata est plus grand, offre des capacités supérieures et des moyens dernier-cri, ainsi qu’une autonomie plus importante pour accroître la couverture opérationnelle et tendre vers une permanence de la surveillance. La plateforme est, à ce titre, conçue pour être très économique et pouvoir effectuer chaque année un nombre de jours à la mer particulièrement élevé.

Le Marjata III va devenir Eger (© : DR)
Quant à l’Eger, qui va bénéficier d’une modernisation de sa plateforme comme de ses moyens de détection et d’analyse, il devrait être opérationnel dans sa nouvelle configuration en 2017. Ce navire adoptant le design Ramform, que l’on retrouve sur les navires sismiques de la compagnie de géophysique PGS, mesure 80 mètres de long pour 39 mètres de large, avec un déplacement de 7560 tonnes en charge.