La France, comme tous les grands pays occidentaux, suit de très près l’évolution de la situation en Ukraine, où le gouvernement provisoire de Kiev fait face aux velléités séparatistes dans des provinces pro-russes de l’Est du pays. Dans cette perspective, Paris a déployé différents moyens de surveillance, dont le Dupuy de Lôme. Mis en service en 2006 au profit de la Direction du renseignement militaire (DRM), ce navire, pudiquement appelé « bâtiment d’expérimentation et de mesures », est spécialisé dans la collecte de renseignements et la recherche électromagnétique. Il dispose notamment, à cet effet, de puissantes antennes, dont des intercepteurs de transmissions, permettant d’intercepter et de traiter différents types de signaux (écoute, goniométrie, analyse électromagnétique).

Destroyer américain du type Arleigh Burke (© US NAVY)
Le passage des Dardanelles en compagnie de l’USS Donald Cook
Le Dupuy de Lôme est entré en mer Noire le 10 avril, franchissant le détroit des Dardanelles en compagnie du destroyer américain USS Donald Cook, l’une des unités du type Arleigh Burke dotées de moyens de défense antimissile balistique basées depuis peu à Rota, en Espagne. L’arrivée de ce destroyer de l’US Navy en mer Noire a, d’ailleurs, été marquée le 12 avril par une rencontre du bâtiment avec un avion de combat russe Su-24, qui l’a survolé à plusieurs reprises durant une heure et demi. Des passages à basse altitude qui n’ont pas été du goût des Américains, le Pentagone évoquant une « provocation russe », le Sukhoï n’ayant « pas répondu à plusieurs requêtes et avertissements du Donald Cook ». Une protestation à visée surtout politique et destinée à l’opinion publique puisqu’en fait, ce type de manœuvre, dans le contexte actuel, est parfaitement courant, les « adversaires » venant se titiller afin de marquer leur présence et au passage recueillir éventuellement des renseignements (le Su-24 était, par exemple, peut être doté de moyens de guerre électronique).

Le Dupuy de Lôme (© MICHEL FLOCH)
Déployé dans toutes les zones sensibles
Pour en revenir au Dupuy de Lôme, sa présence en mer Noire, où il navigue dans les eaux internationales, est logique. Comme en océan Indien, en Libye ou en Syrie précédemment, le bâtiment, qui se déplace généralement avec la plus grande discrétion (ce qui ne pouvait être ici le cas en raison du franchissement des Dardanelles), est systématiquement déployé dans les zones de crise et d’intérêt stratégique. En complément d’autres moyens, comme les satellites de surveillance, il contribue, en effet, à permettre au gouvernement de suivre au plus près l’évolution d’une situation et de disposer en toute autonomie de renseignements fiables. On rappellera par ailleurs qu’il ne s'agit pas à proprement parler d'un bâtiment de combat mais d’un navire construit aux normes civiles, peint en blanc et seulement doté de quelques armes pour son autodéfense (voir notre reportage réalisé en 2005 sur le Dupuy de Lôme)

L'Alizé (© BERNARD PREZELIN)
L’Alizé et le Dupleix
En dehors du Dupuy de Lôme, la présence en mer Noire du bâtiment de soutien à la plongée Alizé (utilisé notamment par les commandos marine) est évoquée, mais n’a pas été confirmée par le ministère de la Défense. Quant à la frégate anti-sous-marine Dupleix, elle se trouve selon les militaires en Méditerranée orientale, où elle assure la permanence du dispositif de surveillance déployé depuis plus de trois ans au large de la Syrie.

Le Dupleix (© MARINE NATIONALE)