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Le programme franco-britannique de missile antinavire léger ANL/Sea Venom progresse. MBDA a récemment annoncé avoir réalisé avec succès, en mars, le premier test d’emport et de séparation de l’engin depuis un hélicoptère Lynx Mk8 de la Royal Navy. Alors que le missile est prévu pour équiper en premier les nouveaux AW159 Wildcat de la Fleet Air Arm, cette campagne avait pour but de démontrer la compatibilité du missile avec les modèles plus anciens de la famille Lynx. Pour se faire, MBDA a profité de la disponibilité du dernier Mk8 de la marine britannique avant son retrait du service. Un message envoyé en particulier aux utilisateurs actuels du Lynx ou du Super Lynx, comme la Malaisie, le Brésil, la Corée du sud, l’Allemagne, l’Algérie ou encore l’Afrique du sud.  

Successeur du missile britannique Sea Skua et du français AS-15 TT, l’ANL/Sea Venom peut en effet, moyennant certaines modifications, être adapté aux Lynx et Super Lynx existants, ce qui ouvre des perspectives intéressantes à l’export.

 

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© DGA

Dauphin du CEV avec un ANL (© DGA)

Premier tir prévu cette année

Mais le nouveau missile franco-britannique est aussi conçu pour les machines de type Panther et c’est d’ailleurs avec un Dauphin du Centre d’essais en vol de la Direction Générale de l’Armement que les tests de tir seront réalisés cette année en France. L’objectif de la Royal Navy, qui à l’instar du Sea Skua pourra employer le Sea Venom en tandem avec de petits missiles LMM (d’où l’emploi du terme « lourd » dans le nom initial du programme : Future Anti Ship Guided Weapon – Heavy), est de disposer d’une capacité opérationnelle en 2020. Chaque Wildcat sera capable d’emporter jusqu’à quatre Sea Venom, configuration qui pourra également être offerte sur les Panther ou encore une version militarisée du nouveau H160 d’Airbus. Les machines plus légères, de la classe 3 tonnes, pourront quant à elles mettre en œuvre deux missiles.

 

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© EUROCOPTER

Maquette d'ANL sur un Panther (© AIRBUS)

Contre de petites cibles navales et des objectifs côtiers

Très compact et léger, l’ANL/Sea Venom mesure 2.5 mètres de long et affiche une masse de 110 kilos (contre 150 pour le Sea Skua), dont 30 kilos de charge militaire optimisée pour la lutte antinavire. Conçu pour neutraliser de petites cibles de surface, comme des embarcations rapides, et infliger de sérieux dégâts à des bâtiments de combat allant jusqu’à la corvette de 500 tonnes, cet engin offre une portée donnée à 20 kilomètres, soit 5 de plus que la portée officielle du Sea Skua. Il a aussi une capacité de frappe contre des objectifs côtiers peu durcis, comme des stations radar ou batteries, ce que ne permettait pas son aîné.  « Il est plus furtif, très agile, permet des engagements sur le littoral et contrairement au Sea Skua peut non seulement être tiré en mode fire and forget, mais aussi être guidé en phase finale », explique-t-on chez MBDA.

 

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© MBDA

(© MBDA)

Possibilité de guidage final

Contrairement à l’AS-15 TT et au Sea Skua, l’hélicoptère porteur n’a pas besoin d’illuminer l’objectif pour guider le missile. Le Sea Venom est tiré sur une piste pré-désignée et, quelques kilomètres avant d’atteindre la cible, allume son autodirecteur infrarouge. Grâce à une liaison de données bidirectionnelle, l’opérateur présent dans l’hélicoptère reçoit l’image fournie par l’autodirecteur du Sea Venom et peut intervenir sur le vol du missile jusqu’à l’impact en modifiant le point à frapper. « Cela offre au Sea Venom une très grande précision et permet de redésigner ou repréciser la cible au dernier moment ». Les ingénieurs de MBDA ont par exemple travaillé sur un scénario d’emploi original : comment, à défaut d’autres moyens, stopper en urgence un navire de commerce détourné par des pirates ou des terroristes. « S’il s’agit d’un tanker, il est évidemment hors de question de couler le bateau et il faut donc trouver un autre moyen de l’arrêter. Le Sea Venom est en fait suffisamment précis pour permettre la destruction du gouvernail et de l’hélice ». Dans ce cas, le missile pourra pénétrer dans l’eau et exploser dans le propulseur, avec des dommages limités évitant une marée noire.

 

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© ROYAL NAVY

Wildcat (© ROYAL NAVY)

Un outil très utile en zones littorales

Par rapport au Sea Skua, le nouveau missile antinavire est donc très polyvalent et offre bien plus de capacités d’action. Son emploi sera particulièrement optimisé sur le Wildcat, doté notamment d’un puissant radar et d’un système électro-optique, facilitant la détection, l’identification et la poursuite d’une cible. Un vrai atout dans un milieu complexe, comme en zones littorales, près d’une côte très découpée et en présence de nombreux bateaux civils. Là où il serait par exemple très risqué pour une frégate d’employer un missile antinavire lourd.

Accroître les capacités offensives des bâtiments

Grâce à son allonge, le Sea Venom permettra à l’hélicoptère porteur de neutraliser avec précision des menaces en restant hors du champ d’engagement de systèmes de défense aérienne à courte portée. Et, bien sûr, il augmentera la capacité offensive du bâtiment depuis lequel l’appareil est déployé, surtout si celui-ci est dépourvu de missiles antinavire.

Une version mer-mer à l’horizon

Cela offre d’ailleurs des perspectives intéressantes aux marines souhaitant accroître les moyens d’attaque de plateformes de type OPV ou corvettes légères. A terme, MBDA envisage même de développer, à l’instar du Marte, une version mer-mer du Sea Venom. Un système très compact et léger capable d’être intégré sur de petits bateaux, comme des vedettes.

 

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© MBDA

NH90 et ANL (© MBDA)

Dans l’attente des décisions françaises

Complémentaire de missiles lourds comme l’Exocet, à la portée et la charge militaire bien supérieures afin de neutraliser des cibles plus imposantes, l’ANL/Sea Venom, en dehors de succéder au Sea Skua dans la Royal Navy, doit permettre de redonner à son homologue française une capacité qu’elle a perdue en 1995 suite au retrait du service de l’AS-12.

Pour l’heure, la France, qui a signé en 2014 un accord de coopération avec le Royaume-Uni pour le développement de ce nouveau missile, n’a pas encore passé commande de l’ANL, dans l’attente notamment du choix du porteur qui sera amené à le mettre en œuvre. Sachant que les coûts d’intégration sur une plateforme sont très élevés, il est peu probable que la Marine nationale obtienne les financements nécessaires pour gréer à la fois ses NH90 et les futures machines du programme HIL (hélicoptère interarmées léger). Ce dernier doit être basé sur le H160 et remplacera les Alouette III, Dauphin et Panther. La livraison des premiers HIL aux armées françaises est prévue en 2024.

 

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© AIRBUS HELICOPTERS

H160 (© AIRBUS HELICOPTERS)

 

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