Alors que la nouvelle loi de programmation militaire prévoit une augmentation sensible des effectifs des forces spéciales, les sénateurs Daniel Reinier, Jacques Gautier et Gérard Larcher viennent de rendre un rapport sur cette évolution. Le document, qui a été approuvé à l’unanimité par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, estime ce renforcement nécessaire. Toutefois, il met en lumière un certain nombre d’inquiétudes quant à l’exécution des objectifs, qui doivent voir le Commandement des Opérations Spéciales (COS) passer de 3000 à 4000 hommes entre 2014 et 2019. Les rapporteurs considèrent que « l’objectif de mille personnels supplémentaires sera difficile à atteindre sans sacrifier la qualité à la quantité, compte tenu des processus de sélection des forces spéciales ». C’est pourquoi ils recommandent que « le renforcement quantitatif soit accompagné d’une réflexion sur l’articulation des forces spéciales avec les forces conventionnelles et les forces clandestines », ajoutant que « ce serait l’occasion pour le gouvernement de s’interroger sur le format du Service Action de la DGSE, réflexion d’autant plus nécessaire que l’émergence du biometrics impose de repenser l’action clandestine ».
« Le plan envisagé pour l’instant ne concerne qu’à la marge les équipements »
Mais les sénateurs se disent surtout inquiets quant aux efforts en matière d’équipements liés au renforcement des effectifs. En clair, selon eux, les crédits envisagés sont trop faibles pour doter les 1000 commandos supplémentaires de matériels appropriés : « Le plan envisagé pour l’instant ne concerne qu’à la marge les équipements », « une augmentation des effectifs, sans augmentation proportionnelle des équipements, limiterait considérablement les effets du renforcement. Nos forces spéciales ne pourront accomplir les missions que l’on attend d’elles qu’à la condition de disposer des équipements adéquats, en quantité nécessaire ».
Enfin, les rapporteurs appellent de leurs vœux « des mesures d’accompagnement, telles que l’optimisation du recrutement et des formations, la valorisation des carrières, la modification des procédures d’acquisition et d’homologation des équipements (question d’un pouvoir adjudicateur dédié aux opérations spéciales). Ils recommandent également de mieux insérer le COS dans la communauté du renseignement et de renforcer la coopération avec les forces alliées ».

Jean-Yves Le Drian à la rencontre des forces spéciales l'an dernier (© EMA)
Complémentaires des forces conventionnelles
Les sénateurs ne remettent toutefois pas en cause la décision de muscler les effectifs du COS. « Ce renforcement est nécessaire pour alléger la tension permanente qui pèse sur les 3 000 hommes des forces spéciales. Il l’est également car le système de forces spéciales françaises est adapté aux menaces que la France connaît actuellement et préfigure vraisemblablement les formes d’engagements futurs des dix prochaines années ». Ils attirent toutefois l’attention sur le fait que les commandos ne peuvent se substituer aux autres forces, dont le niveau doit être impérativement maintenu. « Les forces spéciales sont certes différentes, mais complémentaires des forces conventionnelles (…) il serait illusoire de vouloir compenser la diminution de celles-ci par l’augmentation de celles-là. De la même façon, il n’est pas question de vouloir créer une "quatrième armée". Les forces conventionnelles demeurent essentielles pour la sécurité de notre pays ».

(© EMA)
Les commandos français
Commandos de l’armée de Terre, de la Marine nationale et de l’Armée de l’Air, les actions de ces unités, représentant environ 3000 hommes, dont 400 commandos marine, sont planifiées et conduites par le COS, créé en 1992 suite à la guerre du Golfe et placé sous la responsabilité du chef d'état-major des Armées.
Ces forces interarmées sont capables de travailler ensemble tout en conservant leurs spécificités et une expertise propre liées à leur milieu d’appartenance (terre, air, mer). Elles effectuent des missions de renseignement, d’action (attaque d’objectifs stratégiques, neutralisation d’installations, capture ou récupération de personnel, contre-terrorisme…), ou encore de formation, de conseil et d’encadrement d’unités militaires étrangères. Elles participent aussi au processus d’évaluation et d’aide à la décision, notamment lors de l’ouverture d’un théâtre d’opération.

(© MARINE NATIONALE)
Le COS, dont l’état-major opérationnel est implanté sur la base aérienne de Villacoublay, près de Paris, s’appuie sur une douzaine d’unités : pour l’armée de Terre, le 1er régiment de parachutistes d’infanterie de marine (RPIMa) de Bayonne, le 13ème Régiment de Dragons Parachutistes (RDP) installé à Martignas-sur-Jalle et un détachement de l’Aviation légère de l’armée de Terre (ALAT) dédié aux opérations spéciales et situé à Pau ; pour la Marine nationale les commandos Trépel, Jaubert, de Penfentenyo, Montfort et Kieffer (Lanester), ainsi que les nageurs de combat du commando Hubert, basé à Saint-Mandrier ; et pour l’armée de l’Air le commando parachutiste de l’air (CPA) n°10 et l’escadron de transport (ET) Poitou basés à Orléans-Bricy, ainsi que l’escadrille spéciale hélicoptère (ESH) de Cazaux.
- VOIR LE RAPPORT SENATORIAL SUR LES FORCES SPECIALES

(© EMA)