Prolongement de la classe F70, accélération de la construction des FREMM, réaffectation des nouvelles frégates entre Brest et Toulon… La Marine nationale planche sur les conséquences de la vente potentielle de la Normandie à l’Egypte et sur les mesures qui devront être prises si la cession est actée. Dans ce cas, le bâtiment, qui n’a pas encore été livré à la flotte française, serait directement remis par DCNS à l’Egypte, qui veut disposer d’une FREMM dès l’été prochain.
Alors que les négociations se poursuivent entre Paris et Le Caire, qui souhaite aussi acquérir des Rafale, la Marine nationale, mais aussi DCNS, devront se réorganiser de manière importante si un contrat est signé. Pour mémoire, huit FREMM ont été pour l’heure commandées par la France, trois autres devant ou non être affermies fin 2016. Ces bâtiments doivent remplacer les sept frégates anti-sous-marines du type F70 ASM, dont deux ont été désarmées en 2014 (Georges Leygues et Dupleix), ainsi que deux unités du type F67 (Tourville et De Grasse), retirées du service en 2011 et 2013.
Déficit de frégates à Brest et Toulon
Victimes notamment des restrictions budgétaires, qui ont conduit à étaler et amputer le programme (17 FREMM étaient initialement prévues), leurs remplaçantes n’ont pas été à l’heure pour succéder à l’ensemble des bâtiments déjà mis au rebut. La marine doit donc composer, depuis maintenant quatre ans, avec une flotte de frégates temporairement sous-dimensionnée. Ainsi, sur les huit premières FREMM, seule la tête de série, l’Aquitaine, a pour l’heure intégré la Force d’Action Navale. Livrée en novembre 2012 par DCNS, elle doit être officiellement admise au service actif dans les prochains mois. Seconde unité de ce type (ou plutôt troisième puisque la FREMM n°2 a été attribuée au Maroc qui l’a réceptionnée en janvier 2014), la Normandie devait être livrée fin 2014. Mais, en raison des négociations avec l’Egypte, le processus a été pour ainsi dire suspendu.
Un vrai problème pour la FAN qui a un besoin pressant de cette seconde frégate de nouvelle génération. Elle doit en effet rejoindre l’Aquitaine à Brest pour permettre à la marine de disposer enfin, à la pointe Bretagne, d’un premier noyau de deux FREMM, dont la mission principale sera la protection des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) basés à l’Ile Longue. Il s’agit dans un premier temps de compléter, puis de succéder progressivement - avec l’appoint d’autres FREMM - aux trois dernières F70 basées à Brest.

Le Montcalm, du type F70 (© MARINE NATIONALE)
Concernant Toulon, il était prévu d’y positionner les FREMM 3 et 4, en l’occurrence la Provence et la Languedoc (la première a effectué sa première sortie en mer au mois d’octobre et doit être livrée en fin d’année, alors que la seconde a été mise à flot en juillet et doit être réceptionnée en 2016). Tout comme à Brest, l’attente est très vive sur la façade méditerranéenne, où la FAN ne dispose plus depuis le désarmement du Dupleix que de deux frégates ASM du type F70, dont le Montcalm, prévu pour être retiré du service en 2016. Pour remplir l’ensemble de ses missions, dont la protection du porte-avions Charles de Gaulle contre une menace sous-marine, la flotte varoise ne peut évidemment se permettre de passer sous la barre des deux frégates ASM, un niveau déjà très bas et qui ne laisse guère de place à l’imprévu.
Dans ce contexte, on comprend pourquoi la Marine nationale ne peut, si elle perd la Normandie, attendre que les FREMM suivantes arrivent suivant le calendrier en vigueur. C’est pourquoi un plan a été élaboré au cas où la frégate serait bel et bien vendue à l’Egypte.

La Normandie et l'Aquitaine (© DCNS)
La Provence à Brest et le Montcalm prolongé
La présence au plus vite de deux FREMM à Brest étant considérée comme une priorité absolue, la Provence serait alors réaffectée, se voyant basée dès cette année à Brest au lieu de Toulon comme prévu initialement. Pour ce qui est de Toulon, l’état-major prolongerait le Montcalm jusqu’en 2017 afin de faire la jonction avec la Languedoc.
Accélérer la cadence de production à Lorient
Ensuite, il a été demandé à DCNS de se préparer à accélérer le rythme de production des FREMM, afin de réduire les délais de livraison à la flotte française. « Rien n’est encore fait pour la Normandie mais, si elle doit être vendue, nous avons pris des assurances auprès de l’industriel, qui pourra revenir au schéma de production initial des FREMM. Ainsi, on peut garantir que quatre frégates auront été livrées à la marine fin 2016 et six fin 2018 », explique l’amiral Bernard Rogel, chef d’état-major de la Marine nationale. Pour mémoire, le site DCNS de Lorient a été dimensionné pour pouvoir produire une FREMM tous les 7 mois, un rythme qui avait ensuite été ramené à une unité tous les 10 mois puis une tous les ans, et qui devait encore être réduit.