Aller au contenu principal

C’est une très belle victoire allemande et une grosse déception française. Singapour a finalement retenu l’offre de TKMS, qui va lui livrer d’ici 2020 deux nouveaux sous-marins. Ces bâtiments sont destinés à remplacer les quatre unités de 51 mètres et 1130 tonnes (en surface) du type Sjöormen. Il s'agit du Challenger (ex-Sjöbjörnen), du Centurion (ex-Sjöormen), du Conqueror (ex-Sjölejonet) et du Chieftain (ex-Sjöhunden), mis en service en 1968/1969 et achetés auprès de la marine suédoise entre 1995 et 1997. En dehors de ces vieux bateaux, la flotte singapourienne compte deux autres anciens sous-marins suédois, les Swordsman (ex-Västergötland, 1987) et Archer (ex-Hälsingland, 1988), de 60 mètres et 1500 tonnes, qui ont été remis en service en 2011 et 2012. Bien que plus récents, ils dépasseront les 30 ans d’âge avant la fin de la décennie. Il serait donc logique que Singapour ne se contente pas de deux nouveaux sous-marins mais prolonge la série.

 

 

83012 singapour challenger
© MARINE NATIONALE

Le Challenger (© MARINE NATIONALE)

 

83011 singapour swordsman
© TKMS

Le Swordsman (© TKMS)

 

 

Un nouveau design

 

 

Concernant le modèle retenu, le ministère singapourien de la Défense annonce des unités du type 218SG, un design jusqu’ici inconnu. Seules précisions données par les autorités : « Les sous-marins de remplacement auront des capacités significativement supérieures et seront équipés de systèmes de propulsion anaérobie ». Le type 218SG a semble-t-il été spécialement conçu pour Singapour, mais il parait évident que ce modèle se base sur l’un des designs développés par HDW, la filiale de TKMS spécialisée dans les sous-marins. Il peut s’agir du type 214, un bateau de 65 mètres et 1700 tonnes déjà vendu à plusieurs marines (Corée du sud, Grèce, Turquie) ou bien, plus vraisemblablement, du nouveau type 216, que le constructeur allemand a dévoilé en 2011 et qui est notamment proposé à l’Australie. Alors que le premier, de taille réduite, se prête bien aux opérations littorales, le second a une vocation clairement océanique.

 

 

83010 tkms 214
© TKMS

Le type 214 (© TKMS)

 

 

Le type 216

 

 

Qu’il ait servi ou non de base au 218SG, il n’est pas inintéressant de détailler aujourd’hui le type 216. Plus gros sous-marin conçu jusqu’ici par HDW, ce bâtiment de 90 mètres de long pour 8.1 mètres de diamètre affiche un déplacement de 4000 tonnes en surface. Ce modèle rompt avec l’aspect compact qui distingue les derniers sous-marins allemands. Un choix dicté par les besoins opérationnels de certaines marines, qui souhaitent opérer des bâtiments à grand rayon d’action et fortes capacités. Le type 216 a été imaginé dans cette perspective, en offrant une autonomie considérable et des capacités d’emport très importantes. Pouvant rester 80 jours en mer et franchir 10.000 milles à 10 nœuds au schnorchel, le type 216 dispose d’un système de propulsion anaérobie (AIP) et de batterie lithium/ion. La taille du bâtiment permett d’augmenter la capacité des batteries, l’autonomie en plongée atteignant quatre semaines. L’automatisation est très poussée puisque HDW a imaginé un équipage de seulement 33 hommes. Le CO, séparé du Centre de contrôle technique par une cloison transparente, compte sept consoles multifonctions permettant de gérer, grâce au système de combat, l’ensemble des senseurs et l’armement. L’intégration d’un système de visualisation 3D est même avancée.

 

 

83009 tkms 216
© TKMS

Le type 216 (© TKMS)

 

 

En matière de sonars, le type 216 est proposé avec une panoplie complète (sonar d’étrave cylindrique, sonar de poupe, antenne de flanc, système d’évitement de mines…), fournie par Atlas Elektronik. Un mât modulaire peut, quant à lui, accueillir en plus des équipements traditionnels différents matériels, comme un canon télé-opéré et des moyens renforcés de guerre électronique. Très grande, la coque en acier HY80, à haute résistance élastique, permet un aménagement intérieur sur deux ponts pour mieux répartir les locaux, avec des espaces modulaires. Un local polyvalent peut, ainsi, accueillir une cellule dédiée au renseignement, servir de salle de réunion  ou de logement.

 

 

83008 tkms 216
© TKMS

Le type 216 (© TKMS)

 

 

Un important travail a été mené sur les capacités d’hébergement, le confort et les conditions de vie à bord du bâtiment, amené à être déployé sur de longues périodes. On compte dix cabines de six couchettes chacune, des espaces de détente et une salle de sport à l’avant. Vingt et un couchages supplémentaires, dont seize provisoires, sont également disponibles. Pour les opérations spéciales, le matériel des commandos est stocké à bord, ou dans un conteneur amovible fixé sur la coque et pouvant abriter des engins sous-marins. Le local pour les armes de réserve peut aussi être reconfiguré en zone de stockage ou couchages additionnels. En plus des six tubes lance-torpilles, le type 216 peut embarquer un module de lancement vertical pour missiles de croisière. Il est également conçu pour la mise en œuvre de drones sous-marins.

 

 

83013 scorpene
© DCNS

Scorpène (© DCNS)

 

 

Le projet français Echo et les piles à combustible

 

 

Pour les nouveaux sous-marins singapouriens, TKMS était en compétition avec le groupe français DCNS, qui espérait bien emporter la mise. Alors que la France n’a pas ménagé sa peine pour aider son industrie à remporter ce contrat, DCNS misait sur la réussite du programme des six frégates du type Trident (projet Delta), livrées entre 2007 et 2009. Après la tête de série, le Formidable,  sortie des chantiers de Lorient, les cinq unités suivante avaient été réalisées en transfert de technologie par Singapore Technology Marine. Les Français comptaient donc capitaliser sur ce succès pour vendre à leur client asiatique des sous-marins du type Scorpène. Un projet baptisé Echo qui revêtait une très grande importance pour DCNS. Car, en dehors de la vente à un nouveau pays d’un produit qui a déjà remporté de très beaux succès en étant acquis par le Chili, la Malaisie, l’Inde et le Brésil, il s’agissait aussi d’équiper les bâtiments avec un tout nouvel AIP utilisant une technologie  basée sur le principe des piles à combustible, sur laquelle DCNS travaille dans le plus grand secret depuis plusieurs années. Cette nouvelle génération de propulsion anaérobie doit succéder au système MESMA  mis au point dans les années 2000 et qui reprend le principe de la propulsion nucléaire (vapeur), la source chaude étant remplacée par de l’éthanol ou du gasoil. Un système proposé sur les Scorpène mais qui n'a, pour le moment, été vendu qu'au Pakistan pour équiper ses trois Agosta 90B. 

Aller plus loin

Rubriques
Défense
Dossiers
ThyssenKrupp Marine Systems - TKMS Naval Group