Le quai Noël, dans la base navale de Toulon, fait l’objet depuis des mois d’importants travaux dans le cadre de la construction de deux appontements de 180 mètres de long pour 17 mètres de large, destinés à accueillir les nouvelles frégates multi-missions (FREMM) de la Marine nationale. Avec en tout quatre nouveaux postes, qui pourront aussi être utilisés pour le stationnement des frégates du type La Fayette (FLF). En plus de l’édification des appontements (CA1 et CA2), le chantier, supervisé par le Service des infrastructures de la Défense (SID), porte également sur la réalisation de différents réseaux (haute tension, basse tension, courant faible, air, eau) et d’un mur chasse-mer entre chaque ligne, dont la fonction est d’empêcher la submersion du quai Noël, qui sera également remanié. Ces travaux concernent un linéaire de quai de 281 mètres.

Vue virtuelle des futurs appontements CA1 et CA2, avec ici des frégates du type La Fayette (© : SID)
La FREMM Languedoc aux appontements Milhaud (© : MARINE NATIONALE)
Un chantier complexe
Notifié en mai 2013 pour un montant de 34.6 millions d’euros, comprenant les études, le chantier et la maintenance des nouveaux ouvrages pendant 7 ans, le programme a débuté par un dragage de la zone à 8.7 mètres, afin de disposer d’une profondeur suffisante pour le tirant d’eau des FREMM (7.5 mètres avec dôme sonar). Une phase préparatoire importante mais aussi complexe, du fait notamment de la présence, dans les fonds de la rade de Toulon, de nombreux vestiges historiques. Il faut en effet se rappeler que le port a subi de lourds bombardements à la fin de la seconde guerre mondiale, sans compter les restes des bâtiments coulés lors du sabordage de la flotte, en novembre 1942. Situé sur l’îlot Castigneau, le quai Noël accueillait alors de nombreux contre-torpilleurs et torpilleurs des Forces de Haute Mer (*). Le dragage a donc nécessité une intervention dans un cadre strict, tant d’un point de vue environnemental que pyrotechnique, car le SID comme la Marine nationale étaient certains de tomber sur des débris métalliques, des polluants (comme des restes de soutes), mais aussi un nombre plus ou moins important d'explosifs historiques enfouis dans la vase. Avec le risque de découvrir différents types d’engins, comme des obus, bombes, mines, torpilles ou encore grenades sous-marines. Ce qui fut effectivement le cas.

Barge de support de plongeurs pendant les travaux de dragage en 2013 (© : MER ET MARINE - JL VENNE)
5600 m3 de matériaux dragués
Cette phase des travaux a permis d’évacuer 5600 m3 de matériaux, comprenant principalement 2800 tonnes de sédiments, essentiellement composés de vase. Mais il y a aussi eu 485 tonnes de charbon, 160 tonnes de déchets industriels (bois, plastiques, pneus...), 25 tonnes de métaux (tôles, tuyaux, poutres métalliques...) et 200 mètres de chaînes mères (chaînes qui étaient installées au fond de l’eau pour l’amarrage des navires). Sur le plan pyrotechnique, ce furent finalement 600 objets qui ont été remontés à la surface, pour la plupart des obus, cartouches et pétards de démolition (utilisés notamment pour couler les bateaux et détruire leurs équipements lors du sabordage). Mais il y avait aussi, au fond de cette zone de la base navale, une bombe américaine de 1000 livres (soit 256 kg/ équivalent TNT).

Le chantier du CA1 le 26 avril (© : MER ET MARINE - FRANCIS JACQUOT)
La construction des appontements
Une fois le site dragué et dépollué, tous les matériaux remontés étant traités selon leur nature, les travaux de construction des appontements ont pu débuter. L’édification du CA1 a commencé le 4 juillet 2016 et celle du CA2 le 7 novembre dernier. Le premier doit être livré en octobre 2017 et le second en février 2018. Le chantier a consisté, dans un premier temps, à installer d'imposants pieux destinés à soutenir les futurs appontements. Les opérations de battage sont menées depuis le quai Noël et via des barges, avec trois rangées de 16 pieux par ouvrage. Chaque pieu, long de 43 mètres, est au moyen de la technique de « vibrofonçage » enfoncé d’une trentaine de mètres dans le sous-sol de la rade. Des poutres transverses sont ensuite installées sur la partie émergée des pieux, avant de couler les dalles et corniches en béton. C’est à ce stade qu’en est rendu l’appontement CA1, les pieux du CA2 étant actuellement en partie installés, certains supportant déjà les poutres de soutien des dalles.



Le chantier du CA2 le 26 avril (© : MER ET MARINE - FRANCIS JACQUOT)

Le chantier du CA1 le 26 avril (© : MER ET MARINE - FRANCIS JACQUOT)

Le chantier du CA1 le 26 avril (© : MER ET MARINE - FRANCIS JACQUOT)
Meilleure gestion des bâtiments à quai
Grâce à ces deux nouvelles lignes d’accostage, la base navale disposera d’ouvrages modernes et adaptés à l’accueil des FREMM, dont deux exemplaires (Languedoc et Auvergne) sont déjà basé à Toulon (deux autres le seront en 2021 et 2022). Il s’agit aussi de prévoir, à l’avenir, le soutien des futures FTI, qui succèderont aux La Fayette. Avec globalement des bâtiments de nouvelle génération plus gros que leurs aînés et nécessitant donc plus de place. Les appontements du quai Noël permettront aussi de soulager la zone de Milhaud (qui accueille notamment le porte-avions Charles de Gaulle et les BPC du type Mistral), où la place est limitée et qui est souvent pleine. La CA1 et CA2 offriront donc des capacités supplémentaires et redonneront de la souplesse dans la gestion des unités à quai, mais aussi dans le cadre de futurs travaux de maintenance et de modernisation des quais les plus anciens.

Les appontements Milhaud (© : MER ET MARINE - JEAN-LOUIS VENNE)
(*) Ont été sabordés à l'îlot Castigneau les contre-torpilleurs et torpilleurs Guépard, Tartu, Cassard, L'Indomptable, Volta, L'Adroit, Bison, Le Hardi, Foudroyant, Trombe, Siroco, Le Palme et La Bordelaise.