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Redonner un portage politique aux projets de conventions visant à la protection des océans. C’est le programme du « segment de haut niveau », c’est-à-dire la réunion d’une quarantaine de chefs d’Etat et de responsables politiques aujourd’hui au One Ocean Summit, à Brest. Emmanuel Macron a inauguré fin 2017 ce type de méthode avec le One Planet Summit, lancé juste après que les Etats-Unis de Trump aient claqué la porte des accords de Paris. Une démarche visant à réunir autour de la table des Etats volontaires pour donner une impulsion et une visibilité à des travaux souvent très techniques et qui pourtant ont vocation à devenir le cadre règlementaire des années à venir. « Le multilatéralisme d’action », comme on le qualifie à l’Elysée.

Aujourd’hui, ce sont donc des responsables politiques du monde entier, en présentiel ou à distance, qui vont devoir donner cette impulsion politique à des textes un peu arides, jusqu’ici réservés au milieu diplomatique. Pour sélectionner les invités, l’Elysée précise que le réseau diplomatique français, mis à contribution pour la préparation de ce sommet, n'a retenu que ceux qui venaient avec des « engagements clairs et concrets ». 

Plusieurs grands chantiers vont être ainsi « politisés » en vue des prochaines échéances de négociation de la COP 15 du printemps, de la COP 27 qui doit se tenir en fin d’année en Egypte ou encore de la conférence des Nations-Unies sur les Océans qui doit se tenir en juin à Lisbonne.

Quatre grandes thématiques

Quatre grandes thématiques ont été identifiées : la protection des écosystèmes marins et la promotion de la pêche durable, la lutte contre la pollution plastique, les solutions face au changement climatique et une gouvernance rénovée des océans. Autour de cette sémantique un peu convenue, il y a des objectifs concrets. Au premier rang desquels, le traité BBNJ qui va entrer en négociation formelle aux Nations-Unies en mars et qui serait le premier texte à introduire une règlementation en haute mer. Si on ne connaît pas les détails du projet de texte actuel, on sait néanmoins qu’il pourrait introduire un encadrement juridique sur l’exploitation des fonds marins, sur la pêche illicite et également la possibilité de créer des aires marines protégées en haute mer. Dans le cadre de la haute ambition pour la nature et les peuples (lancée par la France et le Costa Rica au One Planet Summit le mois dernier), un objectif de protection de 30% des espaces maritimes et terrestres mondiaux a été lancé, soit environ le double de la situation actuelle.

On devrait également largement évoquer la lutte contre la pollution plastique et « lancer » le projet de convention internationale sur le sujet qui doit être formellement débattu fin février lors de la session du programme mondial des Nations Unies pour l’environnement, qui se tient à Nairobi. Des annonces fortes sur le sujet pourraient également être faites par différents pays asiatiques, notamment l’Inde. 

L’accord du Cap, visant à fixer un encadrement règlementaire pour la sécurité des navires de pêche, devrait également pouvoir entrer en vigueur suite à One Ocean Summit qui devrait permettre de rassembler les ratifications manquantes pour le moment. On devrait par ailleurs évoquer la prochaine rencontre ministérielle à l’OMC qui pourrait planifier un accord sur la réduction des subventions dommageables aux ressources halieutiques. Enfin, on devrait aussi travailler sur la question du carbone bleu et un projet franco-colombien de structuration de ce marché permettant la compensation carbone en faveur de projets de réhabilitation et de conservation des espaces marins.

Des annonces internationales, nationales et privées

Du côté du secteur privé, plusieurs armateurs européens devrait annoncer leur participation au label Green Marine Europe qui est un programme volontaire de certification environnementale.

Au plan purement national, de nouvelles aires marines protégées ou peut-être des extensions de celles existant déjà dans la ZEE pourraient être annoncées. Elles pourraient concerner notamment les TAAF et la Polynésie. Ces annonces devraient permettre à la France d’atteindre voire de dépasser l’objectif des 30% d’espaces maritimes nationaux protégés.

Les objectifs sont affichés. Et le sont sous le regard attentif du secteur privé, de la société civile et des ONG. Greenpeace, particulièrement présente et vigilante, salue « l’intérêt politique » que le sommet apporte à la question océanique. Mais selon les propos recueillis par Mer et Marine auprès de François Chartier, chargé de campagne Océans de Greenpeace France, il y a une « inquiétude sur plusieurs points. Nous craignons que l’intervention politique vide les textes de leurs substances. Notamment sur la question de l’exploitation des ressources minières sur laquelle la France n’a pas une position claire puisqu’elle n’a pas signé le moratoire sur la préservation des grands fonds et a inscrit des objectifs d’exploration dans le plan France 2030. Nous craignons également qu’il y ait un manque d’ambition sur le volet conservation qui n’est pas porté politiquement ».

© Un article de la rédaction de Mer et Marine. Reproduction interdite sans consentement du ou des auteurs.

 

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