C’est la toute première sous-station électrique réalisée en France et c’est le symbole de l’émergence d’une nouvelle filière industrielle dans l’éolien offshore. L’énorme transformateur sera chargé d’absorber l’électricité produite par un champ au large des côtes britanniques pour l’expédier vers la terre. Connue chez STX France sous le nom « P33 », la structure trône actuellement dans le bassin C des chantiers et devrait quitter Saint-Nazaire la semaine prochaine. Commandé en décembre 2012 par l’énergéticien danois Dong Energy, l’un des grands spécialistes mondiaux de l’éolien en mer, cet équipement est destiné au projet Westermost Raught, à l’Est du Royaume-Uni. En cours de construction pour une mise en service prévue au premier semestre 2015, ce champ, situé à environ 25 km au large de Spurn Head et de l’estuaire de la rivière Humber, comptera 36 éoliennes dotées chacune d’une turbine de 6 MW développée par l’Allemand Siemens. Sur place, la construction avance progressivement, 22 fondations ayant à ce jour été posées.

Vue de la sous-station électrique quand elle sera dans le parc éolien (© STX FRANCE)
Le futur parc affichera donc une puissance totale de 218 MW, de quoi couvrir la consommation électrique d’environ 200.000 personnes. Seulement voilà, l’énergie ne peut pas être directement transférée depuis les éoliennes jusqu’au réseau terrestre, pour des questions techniques mais aussi de coût. Comme pour tout autre champ éolien en mer, Westermost Raught disposera donc d’une sous-station électrique, reliée aux différentes machines par des câbles sous-marins. L’énergie produite en mer par la rotation des turbines, entrainées par de gigantesques pales, est collectée en un point unique et transformée pour repartir vers le littoral via un unique câble de puissance. Dans le cas de la sous-station réalisée à Saint-Nazaire, c’est un courant de 33.000 volts qui arrive des éoliennes. Deux énormes transformateurs sont, ensuite, chargés d’élever la tension à 155.000 volts pour l’expédier vers la côte, où un autre transformateur, terrestre cette fois, retransformera l’électricité en fonction des caractéristiques du réseau de distribution, qui peut fonctionner selon les endroits en basse, moyenne ou haute tension. La nécessité d’élever le voltage répond à une règle physique voulant que plus l’intensité est forte, moins la résistance, et donc la déperdition en courant est importante.
« Seules quelques entreprises sont capables de réaliser de tels projets »
La sous-station électrique, dont les transformateurs sont la pièce maîtresse, est donc un élément crucial du champ éolien offshore. De sa fiabilité, de ses capacités et de son optimisation dépendent en effet le bon fonctionnement et la rentabilité de l’ensemble. Il s’agit par conséquent d’un objet complexe à très fort degré de technicité, certes moins flamboyant que les paquebots qui sortent habituellement de Saint-Nazaire, mais techniquement au moins aussi remarquable. « Seules quelques entreprises en Europe sont capables de réaliser de tels projets. Cela demande un savoir-faire de pointe, avec des exigences très fortes au niveau des soudures, l’emploi d’aciers spécifiques et le meilleur niveau de montage. C’est ce qui se fait de mieux en matière de constructions maritimes de grandes dimensions », affirme Frédéric Grizaud, directeur de la Business Unit Energies Marines de STX France. De fait, lorsque l’on progresse sur la structure et que l’on observe de près ses différentes parties, la qualité du travail saute aux yeux et on prend rapidement conscience du défi que la conception comme la réalisation d’un tel engin a pu représenter.

Le top side, le jacket et les piles (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Les meilleurs standards de qualité
D’abord, il faut imaginer le gabarit final de la sous-station, lorsque seront assemblés ses deux éléments. Ceux-ci sont constitués d’une partie haute, le « top side », qui abrite les équipements, et de son support, le « jacket », qui reposera sur le fond de la mer du Nord, avec comme ancrage 8 piles de 54 mètres de long et 1.8 mètre de diamètre, qui seront logées dans de grands cylindres doubles (« Pile Sleeves ») fixés à chacune des extrémités du jacket.

Le top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Le jacket (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Le jacket avec à sa base les pile Sleeves (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Le jacket et ses pile sleeves (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

L'une des piles (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Les piles de la sous-station (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
D’un poids de 1450 tonnes, dont 700 tonnes d’équipements électriques, le top side fait 16 mètres de haut, avec une base de 31 par 18 mètres. Quant au jacket, il mesure 38 mètres de haut, dont une vingtaine sera sous l’eau, avec une base carrée de 32 mètres de côté et un poids de 1100 tonnes. Les contraintes sur la structure, du fait des énormes masses en jeu, sont donc très fortes, surtout que l’ensemble doit résister aux conditions météorologiques très rudes de la mer du Nord, tant au niveau de la houle que du vent. « La qualité des matériaux est essentielle. Tous les matériaux utilisés sont nobles, avec de l’acier de haute qualité, de l’inox, du GRP (Glass-reinforced plastic, un composite à base de fibre de verre, ndlr), mais aussi des conduites isolées, une forte galvanisation et des peintures offshore très résistantes », souligne Sébastien Bonneau, responsable de production. « C’est fait pour durer 25 ans mais, en réalité, ce sera certainement beaucoup plus », renchérit Frédéric Grizaud.

Travaux de soudage sur le P33 (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)
La maîtrise des soudeurs
Pour l’acier, par exemple, STX France a travaillé sur des épaisseurs très importantes, soit 40mm en moyenne, avec des parties atteignant 100mm. Rien à voir avec les paquebots et leurs fines coques de 10 à 15mm, surtout qu’il y a là une architecture métallique très complexe, avec des dizaines de grands tubes d’acier croisés et qu’il a fallu, avant de les souder, couper avec des niveaux de tolérance extrêmement bas. Pour accomplir le travail de soudage, les meilleurs spécialistes des chantiers ont été mobilisés et ont bénéficié d’une formation spécifique. « Les procédés de soudage sur ce type de fabrication sont particuliers et le degré d’exigence supérieur à ce que nous faisons d’habitude. Mais nous avons à Saint-Nazaire des soudeurs talentueux et nous avons donc pu nous appuyer sur nos effectifs, qui ont été formés pour réaliser ce travail ».

Travaux de soudage sur le P33 (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)

Le jacket au moment de sa fabrication (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)
En tout, quelques 35.000 soudures ont été effectuées sur la sous-station, avec dans certains cas, pour les parties les plus sensibles, jusqu’à 150 passes par soudure, ce qui est énorme. Le niveau de qualité est tel qu’il a fallu vérifier une par une quelques 17.000 soudures avec différents moyens de contrôle, qu’il s’agisse d’ultrasons ou de magnétoscopie, mais aussi de radiographie pour les parties critiques supportant les charges les plus lourdes. « En plus des contrôles, nous avons mis en place une traçabilité complète. On sait qui a réalisé telle ou telle soudure et à quelle heure », précise Frédéric Grizaud.
A bord du top side
L’intérieur du top side, où les photos sont malheureusement interdites, est à l’image de cette exigence de qualité. « On pourrait presque manger par terre », plaisante le patron de la BU Energies Marines en pénétrant dans l’un des locaux ultra-propres de la structure, qui fera en fait office de centrale électrique au milieu de la mer. Les équipements sont répartis sur quatre ponts principaux. Sur la partie inférieure, en plein air, on trouve notamment des équipements de manutention, dont deux treuils qui serviront à amener à bord les câbles provenant des éoliennes, tirés jusqu’au pied de la sous-station par un navire spécialisé.

La partie inférieure du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

La partie inférieure du top side avec les treuils (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

La partie inférieure du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

La partie inférieure du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Accès aux niveaux supérieurs du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Accès aux niveaux supérieurs du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Aux niveaux supérieurs se situent les locaux abrités. A l’instar d’une centrale terrestre, il y a par exemple la salle des interrupteurs, servant en cas de besoin à couper le courant envoyé à terre. Avec un système d’injection de gaz inerte pour empêcher la formation d’un arc électrique. Un dispositif qui a notamment impliqué de transformer cette pièce en quasi-salle blanche, comme dans les centrales nucléaires, pour éviter la présence dans l’air de particules lors de l’installation des équipements. Mais la partie la plus imposante est sans conteste celle dévolue aux transformateurs. Deux énormes machines de 150 tonnes qui ont été installées à bord grâce au portique Krupp surmontant la forme de construction de STX France. Toute la sous-station est, en fait, construite autour de ces transformateurs, logés dans deux espaces distincts séparés par une cloison et affichant une capacité supérieure de 40% à celle normalement nécessaire. C’est là que le courant arrivant des éoliennes sera transformé avant de partir vers la terre. Parmi les autres locaux du top side, il y a notamment un espace accueillant un dispositif de production de mousse pour les moyens de lutte contre les incendies, ou encore une pièce avec deux diesels-alternateurs de secours d’une puissance unitaire de 280 kW. En fait, un seul DA est suffisant pour assurer les besoins électriques propres à l’ensemble de la station, alimentée en temps normal par l’énergie produite par les éoliennes. « C’est l’une des multiples redondances que l’on trouve à bord. Dans l’offshore, il faut compter avant tout sur ses propres moyens », explique Sébastien Bonneau.

Accès aux niveaux supérieurs du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Une plateforme automatisée
Si l’on trouve sur les parties extérieures des bouées et des canots de sauvetage, il n’y a cependant pas de locaux vie sur cette sous-station, conçue pour fonctionner sans présence humaine. « Il n’y aura personne à bord pour assurer l’exploitation. Les informations arrivant au poste de contrôle et de supervision du champ éolien seront automatiquement relayées à terre au moyen d’antennes de communication. Quant à la station en elle-même, il y a des capteurs partout, sur le top side mais aussi sur le jacket, y compris pour contrôler le développement éventuel de fissures », précise Frédéric Grizaud. Il sera évidemment possible, en cas de besoin, de prendre le contrôle à bord de la station, mais il s’agit uniquement d’un système secondaire au fonctionnement automatique principal. Les interventions humaines sur la sous-station devraient se limiter aux inspections, à la maintenance et aux réparations. En somme, une petite visite par mois si tout va bien, les personnels pouvant monter à bord par bateau ou hélitreuillage. La partie supérieure compte en effet un helipad, mais pas de plateforme d’appontage. Il y a également là une grue de service, un shelter avec des cuves à fuel ainsi que les antennes de communication. On distingue par ailleurs un système de vidéosurveillance, qui couvre l’ensemble de la structure. Ce dispositif permet aux opérateurs qui gèrent le champ depuis la terre de surveiller la sous-station et, en plus des capteurs, de détecter ou confirmer en visuel des évènements anormaux, comme un incendie ou une intrusion.
Cap sur l’installation en mer
Et puis il y a aussi sur le « toit » du top side un impressionnant système de manutention. Installé à titre provisoire, il servira pour le montage en mer de la sous-station. Les deux éléments de celle-ci ont été acheminés fin mars depuis l’aire de pré-montage de la forme de construction du chantier jusqu’au bassin C, au moyen d’un dispositif de roulage capable de supporter 1500 tonnes. Le top side de 1450 tonnes, le jacket de 1500 tonnes mais aussi les 8 piles totalisant 940 tonnes ont été embarqués sur une barge. Celle-ci sera prise en charge par le remorqueur Fairplay 33 afin de rejoindre le Royaume-Uni, avec un départ probable la semaine prochaine si la météo le permet.

Embarquement sur la barge (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)

La barge en attente dans le bassin C (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Le convoi a été préparé pour pouvoir naviguer dans des creux de 2.5 mètres maximum, avec des supports spécialement conçus pour maintenir les équipements transportés et, en raison des mouvements, des renforts temporaires ont été fixés, par exemple au niveau des transformateurs (l’ensemble faisant l’objet de certifications). L’installation en mer a été confiée à Seaways Heavy Lifting (SHL), qui mobilisera pour cette opération le Stanislav Yudin, un navire d’installation de 183 mètres doté d’une gigantesque grue capable de soulever 2500 tonnes.

Le Stanislav Yudin (© SHL)
Celle-ci manutentionnera d’abord le jacket, qui sera posé sur le fond de la mer. Une fois la structure positionnée, il s’agira de l’ancrer, en enfichant dans la roche les 8 piles grâce à une masse de 800 tonnes lâchée par la grue suivant le principe d’un marteau enfonçant un clou. Viendra ensuite le moment de poser le top side sur le jacket et de le fixer. Le top side sera lui aussi soulevé d’un seul tenant grâce au dispositif temporaire installé sur le pont supérieur et qui comprend quatre énormes élingues accrochées à des manilles géantes capables de supporter 800 à 900 tonnes. Lorsque la sous-station sera assemblée, une petite équipe de STX France, soit une demi-douzaine de personnes, reviendra à bord afin de déployer les échelles et raviver les différents systèmes en vue de la mise en service.

Le système de levage en haut du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)

Le système de levage en haut du top side (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Les clés du succès
Seize mois seulement après la signature du contrat intervient la livraison, ce qui constitue selon STX France un record pour un projet de ce niveau. Au pied du mastodonte, Frédéric Grizaud et Sébastien Bonneau, ne cachent pas leur satisfaction de voir la sous-station achevée. Et on devine aussi une certaine fierté, bien légitime. Car, même si le contrat n’avait au moment de sa signature pas fait grand bruit, l’attention pour Saint-Nazaire se concentrant généralement sur les commandes de navires de croisière, le P33 représente sans doute, pour STX France, l’un de ses plus grands challenges techniques. « Comme tous les grands projets, c’est une vraie aventure humaine. Il faut bien voir que c’est une première en France et, lorsque l’on se trouve devant cette sous-station, on prend la mesure des dimensions de l’éolien offshore. Pour réussir ce projet, nous nous sommes appuyés sur nos moyens d’ingénierie et nos compétences dans la construction navale : la fabrication et le montage, la tuyauterie, l’isolation, la ventilation, l’électricité ou encore l’intégration des moteurs, en étant capable d’assurer rapidement l’armement et l’intégration des équipements. Notre capacité à gérer de grands chantiers complexes, avec des projets de très grandes dimensions, beaucoup de corps de métiers à coordonner et des délais très court, ainsi que la présence en interne d’équipes compétentes que nous avons formées à de nouveaux procédés ont aussi contribué au succès ».

Sébastien Bonneau et Frédéric Grizaud (© MER ET MARINE - VINCENT GROIZELEAU)
Pour Frédéric Grizaud, la coopération avec le client a également été fondamentale : « Avec Dong, qui est le leader mondial du secteur et est arrivé avec ses 10 ans d’expérience dans l’éolien offshore, nous avons réalisé un véritable travail d’équipe, qui fait de l’aboutissement de ce projet un succès partagé pour les deux entreprises ». De plus, si STX France est parvenu à développer un nouveau savoir-faire, le chantier a également emmené dans son sillage ses coréalisateurs. SMCN, SNEF, Mecasoud, Gestal, CNI… « Différentes entreprises du réseau Neopolia ont été impliquées et, grâce à cette sous-station, tout le monde a élevé son niveau de jeu.

Le jacket et le top side sur l'aire de prémontage (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)
Naissance d’une nouvelle filière industrielle
L’achèvement du P33 représente donc la concrétisation des efforts entrepris ces dernières années pour diversifier l’activité des chantiers et, de manière globale, faire émerger en France une nouvelle industrie dans le domaine de l’éolien offshore. « Pour nous et nos partenaires, c’est le début de la filière de l’éolien offshore en France. Nous avons beaucoup appris et posé les bonnes bases d’une filière efficace et compétitive ». Une filière qui ambitionne de répondre aux besoins nationaux, mais aussi, et surtout, de se pérenniser grâce aux contrats à l’export. « Dans les prochaines années, le marché européen de l’éolien offshore va voir, en moyenne, l’installation de 3 GW par an, avec 10 à 12 sous-stations électriques à réaliser. Cela représente un investissement annuel d’une dizaine de milliards d’euros, dont 20 à 25% pour les sous-stations et les fondations d’éoliennes », note Frédéric Grizaud. L’objectif de STX France est de parvenir à produire deux sous-stations chaque année, ce qui représenterait quelques 400 emplois permanents sur cette activité et, en matière de contrats, une enveloppe de 30 à 50 millions d’euros par unité. Mais il y a aussi des débouchés attendus au niveau des fondations, avec plusieurs centaines de jackets à la clé.

Le jacket manutentionné par le portique Krupp (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)
Même pour d’autres types de fondation, comme les monopiles, STX France se positionne pour fabriquer les grosses pièces de transition assurant la jonction entre le mât et le pieu. Côté perspectives, le chantier nazairien espère annoncer prochainement de bonnes nouvelles. Il est en compétition sur de nombreux appels d’offres à l’étranger, dont un projet portant sur la réalisation de cinq sous-stations pour Dong, qui devrait choisir le constructeur d’ici la fin de l’année. En France, STX se positionne bien entendu pour fournir les équipements des premiers parcs tricolores. Quatre ont attribués en 2012 à EDF EN (Guérande, Courseulles-sur-Mer et Fécamp, avec des fondations monopiles) et Iberdrola (Saint-Brieuc, seul site dont les éoliennes seront éventuellement équipées d’un jacket). Quant au lauréat du second appel d’offres (Yeu-Noirmoutier et Le Tréport), il a été annoncé ce mercredi par le gouvernement. Il s’agit de GDF Suez, allié à Areva, ce dernier fournissant aussi les machines du champ de Saint-Brieuc (celles des parcs d’EDF EN seront produites par Alstom).

Les éléments de la sous-station sur la barge (© STX FRANCE - BERNARD BIGER)
Un futur pôle dédié et de gros efforts de R&D
Des marchés finalisés dans les prochains mois dépendront le lancement d’un vaste projet visant à développer au sein de STX France un nouveau pôle dédié à l’éolien offshore. Plusieurs phases d’investissement sont prévues, avec la création de nouveaux ateliers spécialisés, ainsi que l’acquisition de moyens de levage et de roulage. Alors que la décision de lancer la construction de cette nouvelle infrastructure devrait être prise d’ici la fin de l’année, les ambitions de l’entreprise sont importantes puisqu’elle espère voir cette diversification représenter jusqu’à 25% de son activité. Certes, une sous-station ne représente que 150.000 heures de travail, à comparer aux millions d’heures que génère un grand navire de croisière, mais la somme de différents contrats peut finir par peser lourd. Ainsi, selon STX France, il y a potentiellement autant de travail sur un grand champ éolien d’une centaine de machines que sur un paquebot de moyenne taille. « Les énergies marines ne viendront pas se substituer à la construction de navires mais elles la complèteront et permettront d’amortir les périodes cycliques, notamment sur le marché des paquebots ». Evidemment, STX France, comme sur ses spécialités historiques, n’est pas seul en lice. Il doit faire face à de sérieux concurrents en Europe et, à terme, en Asie. Proposer des produits innovants et compétitifs est donc une impérieuse nécessité afin de rester dans la course. Déjà, sur le P33, les Nazairiens ont apparemment développé de sérieux atouts : « Nous avons quelques secrets de fabrication qui sont des points forts par rapport à nos concurrents et se font valoir auprès de nos clients ». Et ce n’est pas fini puisqu’en étroite collaboration avec Neopolia, le chantier mène différents programmes de R&D. Alors que Poseol s’intéresse à la conception de navires de pose d’éolienne de nouvelle génération, Fondeol a permis de développer l’AG4, une fondation jacket innovante dont le coût est présenté comme inférieur de 15% à ses homologues actuelles. Enfin, le programme Watteole planche sur l’optimisation des sous-stations électriques. Issue de ces recherches, le, modèle de sous-station proposé notamment pour les parcs français est seulement 50% plus gros que le P33 pour des parcs dont la puissance sera le double de celle du champ de Westermost Raught.

Travaux de R&D dans le cadre du projet AG4 (© STX FRANCE)
L’offshore pétrolier et gazier
Pour finir, il est intéressant de noter que la BU Energies Marines, qui a été créée l’an dernier et compte désormais une quarantaine de personnes, ne s’intéresse pas uniquement à l’éolien offshore. STX France se positionne également sur le marché de l’offshore pétrolier et gazier. Alors que l’entreprise répond à de nombreux appels d’offres, elle a décroché en juin 2013 un contrat auprès de Saipem pour la réalisation d’un module de 350 tonnes. Cette structure de 20 mètres de long pour 6 mètres de large et 11 mètres de haut sera intégrée à l’unité flottante de stockage et de production (FPSO) Girassol, exploitée par Total au large du Nigéria.

Le module de Saipem en cours de réalisation (© MER ET MARINE - V. GROIZELEAU)
Livrable en juin, le module accueillera les équipements électriques et le système de climatisation nécessaires au fonctionnement de nouvelles pompes qui permettront d’augmenter la production de Girassol. Parmi les autres équipements qui intéressent STX France, se trouvent les stations HVDC (High voltage direct courant), de grosses structures de l’ordre de 5000 tonnes chargées d’alimenter les plateformes en courant continu.