Appelés à se prononcer pour ou contre la signature avec la direction d’un protocole d’accord, les personnels navigants de Brittany Ferries ont voté hier soir. A 58.68%, ils se sont dits favorables à cette démarche, bien que le texte inclue le plan de retour à la productivité et la révision des conditions et des rythmes de travail. Suite à cette consultation, les syndicats ont signé le protocole d’accord vers 3 heures du matin, mettant fin à un conflit qui aura duré 10 jours et immobilisé toute la flotte de la compagnie bretonne.
Une sortie de crise dans la douleur
Cette sortie de crise obtenue, les navires vont pouvoir reprendre la mer. Non sans amertume de la part de certains personnels d’exécution et hôtelier, qui estiment avoir eu le couteau sous la gorge et déplorent la manière dont se déroule le dialogue social au sein de l’entreprise. Durant 10 jours, la direction est restée campée sur ses positions et, la semaine dernière, le climat s’est sensiblement tendu. Même le ministre Frédéric Cuvillier, qui avait organisé une table ronde vendredi entre les syndicats et la direction de l’armement, s’est retrouvé avec en face de lui les sièges vides de la direction, qui n’a pas voulu se rendre à cette réunion. Ne souhaitant pas mettre de l’huile sur le feu, le ministre et les syndicats ont simplement appelé à renouer le dialogue. Ce qui fut finalement chose faite samedi soir lorsque les représentants de la CFDT et de la CGT ont revu Jean-Marc Roué, président du directoire de Brittany Ferries. C'est à l'issue de cette rencontre qu'il a été décidé de consulter les personnels navigants (hors officiers), soit 1300 personnes, pour qu'ils se prononcent pour ou contre la signature du protocole d'accord avec la direction.
« Tout ce qu’on pouvait accepter, on l’a accepté, quand cela était acceptable »
Jean-Marc Roué était sorti de son silence médiatique un peu plus tôt. Dans une interview accordée aux quotidiens de l’ouest, il a rappelé la position très ferme de la direction. Dans les propos rapportés par notre consœur du Télégramme, Catherine Magueur, il a expliqué la nécessité d’un plan d’austérité de 12 millions d’euros. « Nous n’avions d’autre choix que de mettre en place un plan de retour à la compétitivité. L’expert nommé à la demande des syndicats a fait le même diagnostic ». Un plan qui est « équilibré » et à « effectif constant », un plan accepté par les officiers et les sédentaires mais remis en cause par les personnels d’exécution et hôteliers, notamment en ce qu’il supprime des primes. « Tout ce qu’on pouvait accepter, on l’a accepté quand cela était acceptable », a martèle Jean-Marc Roué qui, évoque l'urgence de la situation : « On ne peut plus attendre ». Parlant au nom des actionnaires principaux de l’armement, les coopératives agricoles regroupées dans la Sica, il a rappelé que, même « s’ils ne lâcheront pas Brittany Ferries », ils ne rajouteront pas les 10 millions d’euros préconisés par l’expert nommé par les syndicats. « Il est hors de question d’engager l’avenir des coopératives agricoles pour une filiale – Brittany Ferries – qui ne leur a rien rapporté depuis 40 ans ». Et le patron de Brittany Ferries avait conclu, à l’attention des syndicats : « Ma porte est ouverte, mais s’il n’y a pas d’accord, il faudra prendre des décisions douloureuses ».
Il conviendra maintenant de voir comment la compagnie bretonne va redresser la barre et si les mesures de reduction des coûts seront suffisantes. Dans un contexte économique très difficile et une concurrence acharnée sur le transport en Manche, Brittany Ferries est déficitaire depuis plusieurs années. L'armement exploite 10 navires et emploie 2500 personnes.