C’est une marée noire en puissance en mer Rouge. Le FSO Safer rouille, à 60 km du port d’Hodeidah, au Yémen, et moins de 5 milles des côtes. A bord de ce navire de 362 mètres de long lancé en 1976, 140.000 tonnes de brut. Or, cette unité flottante de stockage, appartenant à la compagnie pétrolière nationale (la Safer Exploration & Production Operation Company - SEPOC), mouillée à Ras Issa depuis 1988, où elle servait à stocker et exporter le brut des champs de Marib, n’a reçu aucun entretien depuis 2014, en raison du conflit qui déchire le pays, et menace de fuir. L’an dernier, la salle des machines a été inondée et des réparations d’urgence effectuées, mais l’équipement pour prévenir tout incendie ou explosion ne fonctionne plus. L’un des risques serait notamment que des gaz inflammables s’accumulent dans le FSO. L’ONU a prévenu qu’une marée noire pourrait contraindre à fermer le port d’Hodeidah limitant les importations de nourriture et carburant, priver de 50% des zones de pêche, créer de graves dommages à la biodiversité de la mer Rouge, affecter le trafic maritime et les pays voisins…
Une mission d’inspection des Nations Unies est en négociation avec les milices Houthis, qui contrôlent la zone depuis des mois, en vue d’évaluer le travail de maintenance à réaliser et éventuellement de parer au plus pressé par de menus travaux. Mais elle n’a pu aboutir. Au début du mois, une réunion s’est tenue au Conseil de sécurité de l’ONU, mais selon les rebelles, la mission reste « dans l’impasse ». L’ONU a expliqué qu’« un accord conclu en novembre dernier avec Ansar Allah, la branche politique des houthistes, sur l’étendue des travaux pour l’évaluation du navire avait envoyé des ‘signaux positifs’ », mais « sa mise en œuvre s’est heurtée à des obstacles politiques et logistiques ». L’ONU ne satisferait pas à certaines exigences des Houthis, notamment de laisser superviser chacun des inspecteurs par leurs forces de sécurité et que la mission réalise les réparations lors de l’inspection.
Envoyé spécial au Yémen des Nations Unies, le diplomate britannique Martin Griffits a laissé entendre la semaine dernière que d’autres solutions seraient envisageables, évoquant des « efforts commerciaux du secteur privé ». L’Iran a aussi proposé un navire de remplacement pour que les Houthis puissent conserver le pétrole stocké à bord et relancer la production à l’avenir.
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