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« La nouvelle SNCM n’est plus l’entreprise dont parlent trop souvent ceux qui ne la connaissent pas. Elle intéresse des investisseurs européens de renom qui adhèrent au projet et qui ont besoin d’être rassurés sur le traitement des contentieux avec la Commission européenne pour s’engager plus avant ». Gérard Couturier, président du conseil de surveillance et Marc Dufour, président du directoire de la SNCM, ont envoyé le mardi 6 mai une lettre à tous les députés pour les interpeller sur le sort de la compagnie maritime dont ils disent que la survie se jouent  « dans les jours qui viennent ».

Après le long psychodrame des guerres entre actionnaires, la SNCM n’a, actuellement, toujours aucune vision d’avenir : il faut investir pour mettre en œuvre le plan de redressement mis en place avec les salariés en 2013 mais l'actionnaire majoritaire, Transdev (et derrière lui Veolia), ne veut plus entendre parler de la SNCM. La seule planche de salut résiderait dans d’autres investisseurs – le nom du Norvégien Siem circule avec insistance – mais ceux-ci seraient, selon la direction,  inquiets des conséquences des contentieux européens de l’armement. Pour mémoire, la SNCM est censée remboursée 440 millions d’euros à l’Etat au titre de deux types d’aides jugées indûment perçues par les autorités européennes de la concurrence.

 

 

Des solutions alternatives proposées par le député Quentin

 

 

« Notre entreprise s’est engagée dans un plan de transformation sans précédent à travers un projet industriel ambitieux qui s’appuie sur une stratégie d’investissement, une adaptation négociée des effectifs et surtout un refus catégorique des logiques de déclin », écrivent Gérard Couturier et Marc Dufour. « Cette action de redressement ne doit pas être stoppée par des contentieux européens (…) portant sur des périodes supérieures à 10 ans et sur des dispositifs en leurs temps validés par toutes les instances compétentes. Une application dogmatique des jugements européens de première instance pourrait amener la SNCM à un dépôt de bilan aux conséquences sociales catastrophiques, alors que des solutions existent pour éviter ce drame ».

Ces solutions, ce seraient les pistes évoquées par le député UMP Didier Quentin, qui a présenté son rapport devant la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale la semaine dernière. Il propose, pour la résolution de ce problème, qui outre de risquer la liquidation de la SNCM pourrait également exposer la France à de fortes amendes en cas de non-recouvrement des sommes, d’ « explorer les voies d’un compromis avec Bruxelles ».

Un compromis avec une décision exécutoire de Bruxelles n’est pas une chose aisée. Des recours judiciaires ont déjà été entrepris par l’Etat et la SNCM. Et la Commission n’est pas spécialement connue pour son indulgence en matière de concurrence. Surtout qu’elle a été passablement agacée par l’attitude de l’Etat français qui, juste après l’annonce de sa décision, a affirmé à plusieurs reprises qu’il ne comptait pas recouvrer les sommes. Une bravade sans aucun fondement juridique puisque l’Etat n’est pas en mesure de contredire Bruxelles dans cette matière.

 

 

Un remboursement des aides par la SNCM et une indemnisation par l'Etat

 

 

Le député Quentin en a conscience. C’est sans doute pour cela qu’il estime dans son rapport que « la meilleure solution, car rapide, serait le remboursement par la SNCM des sommes considérées comme indûment perçues même si nous ne sommes pas d’accord avec la position des services de la concurrence ». On sait que le remboursement des 440 millions d’euros par la SNCM est impossible : la compagnie n’a pas de liquidités et n’a pas pu provisionner le moindre euro à cette destination dans l’exercice 2013.

Alors le député imagine une solution impliquant les finances publiques. « Concomitamment, l’Etat indemniserait les actionnaires privés et la SNCM percevrait une indemnisation compensant les sommes qui lui sont réclamées au titre du service complémentaire car elle a effectué le travail durant six ans ». En clair, il s’agirait de faire jouer la responsabilité de l’Etat, en tant qu’auteur du contrat de délégation de service public comportant une clause litigieuse ayant mené à un paiement indû, et au titre du service effectué par la SNCM. Une composition intellectuelle bien menée mais qui ne couvrirait pas l’ensemble des aides (seulement la moitié) et qui risque de ne pas passer les fourches caudines de Bruxelles.

Didier Quentin est conscient qu’il existe « un risque de requalification de ce transfert en aide d’Etat ou en aide à la restructuration par la Commission », mais il estime que, compte tenu de la situation, cette solution « suppose un risque de ce type ». Anticipant la logique des autorités de Bruxelles, il estime qu’il « pourrait être soutenu que l’Etat agit en investisseur avisé dans une économie de marché dès lors que son apport est inférieur au coût de la liquidation qui devrait être compris entre 200 et 400 millions d’euros ». Un exercice d’équilibriste qu’il faudra peut-être tenter, faute de solution alternative...

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