Près d’une cinquantaine d’heures de vol, sept avions différents de cinq pays européens… le golfe de Gascogne a été méticuleusement quadrillé toute la semaine dernière. But de la manœuvre : repérer les rejets d’hydrocarbures illicites dans la zone. L’opération Super Cepco (Coordinated Extended Pollution Control Operations), organisée par la préfecture maritime de l’Atlantique, a réuni cinq pays membres des accords de Bonn (un accord régional européen de lutte contre la pollution en mer) : la Belgique, la France, la Norvège, l’Allemagne et l’Espagne. Alors que cet exercice est organisé régulièrement par un des pays membres des accords de Bonn, les Pays-Bas n’ont pu participer, pour cause de contraintes opérationnelles.
Pendant quatre jours, les appareils et les équipages se sont relayés, de jour comme de nuit, au départ de la base aéronavale de Lann Bihoué, dans le Morbihan. « Ensemble, nous avons effectué une surveillance continue du rail de navigation du Cap Finisterre à Ouessant pour contrôler la présence de pollution par hydrocarbures et, éventuellement, intercepter les contrevenants », détaille le vice-amiral d’escadre Jean-Pierre Labonne, préfet maritime de l’Atlantique. Au bout du compte, pas de pollueur intercepté, une simple pollution orpheline repérée. « Ce n’est absolument pas un échec pour l’opération, cela montre au contraire l’efficacité de notre système, qui a permis, durant les dix dernières années de diviser le nombre de pollution par dix », assure le "Premar".

L'amiral Labonne, préfet maritime de l'Atlantique, fait le bilan de l'opération (MN)
Un système qui, en France, repose sur la collaboration entre les services de l’Action de l’Etat en mer, principalement les Polmar 3, avions dédiés de la Douane, et les Falcon 50 de la flottille 24F de la Marine nationale, spécialisés dans les missions de surveillance maritime, sans oublier la justice, en l'occurence le tribunal spécialisé de Brest pour la zone Atlantique. Les avions repèrent, filment, photographient, puis transmettent, via le Centre Régional Opérationnel de Surveillance (CROSS) de Corsen, les éléments au parquet de Brest. Celui-ci peut alors ordonner le déroutement du navire. A quai, ce sont les officiers de police judiciaire qui vont recueillir les éléments nécessaires à l’enquête. Si suffisamment de preuves sont rassemblées pour qualifier l’infraction de pollution maritime, le procureur va fixer un montant de caution que devra verser l’armateur pour que le navire puisse repartir en attendant le jugement. Mais il arrive aussi qu’un navire dérouté ne soit finalement pas immobilisé. « Les pollutions accidentelles existent », rappelle l’amiral Labonne, « cette année nous en avons eu deux. Les experts, après avoir examiné le navire, ont pu constater que le système de traitement des eaux noires était défaillants. Dans ce cas, il ne s’agit pas d’une pollution volontaire et le navire peut repartir ». En 2011, sur la zone Atlantique, 19 pollutions ont été constatées, 16 pollutions orphelines de faible ampleur, 2 accidentelles et une seule avérée, celle du Kaltene, dérouté cet été vers Brest. « Ces statistiques montrent un vrai progrès dans la lutte contre la pollution. Nous n’allons pas relâcher notre attention. Ce type d’opération coup de poing va se renouveler régulièrement, à notre niveau. »
L’évolution des moyens techniques permet également une meilleure efficacité, via un meillure ciblage des zones d’intervention. « Les avions de la Douane peuvent repérer les pollutions la nuit. Et puis, grâce à la collaboration avec l’Agence européenne de sécurité maritime, nous pouvons bénéficier de la surveillance satellite. » Le satellite Cleanseanet permet, ainsi, de repérer les pollutions isolées. « Le délai de traitement d’une image est de 40 minutes, ce qui nous permet de mobiliser un aéronef en deux heures pour aller constater la pollution.
Les différents aéronefs mis en œuvre pour Super Cepco 2012

Le Beechcraft norvégien (MARINE NATIONALE)
Le Beechcraft King Air 350 ER des garde-côtes norvégiens mesure 14.22 mètres de long pour une envergure de 17 .65 mètres. Basé à Bergen, il effectue tout type de mission au profit des garde-côtes, de la surveillance des zones pétrolières à la police des pêches. Armé par deux personnes, il a une vitesse maximale de 312 noeuds et une distance franchissable de 2355 milles nautiques.

L'avion Polmar 3 de la Douane (MARINE NATIONALE)
L'équipage du Polmar 3 (MARINE NATIONALE)
L’avion Polmar 3 (F406) de la Douane est capable de se poser sur des pistes de 1000 mètres et de voler quatre heures à 170 nœuds. Son équipage opérationnel est constitué de deux pilotes et d’un opérateur du système de télédétection. Il dispose d’un équipement de détection avec un radar SLAR et un scanner IR-UV, ainsi qu’une caméro gyro-stabilisée « très bas niveau de lumière ».

Le Falcon 50 de la Marine Nationale et le Casa N235-300 espagnol (MN)
Le Falcon 50 de la Marine Nationale, est dédié, au sein de la flottille 24F, aux missions de secours en mer ainsi qu’aux missions de surveillance maritime (pêche, pollution, navigation, trafics illicites). A l’avant de l’appareil, les deux pilotes disposent de quatre écrans multifonctions et d’un système de gestion de vol FMS optimisé pour les vols de basse attitude. A l’arrière se trouve tout le matériel nécessaire aux missions de service public : huit conteneurs SAR (ensemble de survie contenu dans un radeau gonflable) peuvent être embarqués et largués via une trappe. Le Falcon 50 qui mesure 18.8 mètres pour une envergure de 18.9 mètres, peut voler à 370 nœuds pour une distance franchissable de 2700 milles nautiques.
Le Casa N235-300 SM02 espagnol est, à l’origine, un avion de transport. Le Salvamiento Maritimo (garde-côtes espagnols) en a 3, un à Saint-Jacques de Compostelle, un à Valence et un autre aux Canaries. D’une longueur de 21 mètres pour une envergure de 25.81 mètres , il peut transporter 44 passagers ou 21 brancards pour les évacuations sanitaires.

L'équipage espagnol (MARINE NATIONALE)
Le Britten Norman Islander belge mesure 11 mètres pour une envergure de 14.92 mètres. Son équipage est composé de deux pilotes et d'un, voire deux, opérateurs. Avec une vitesse maximale de 110 noeuds, l’appareil peut franchir une distance de 550 milles nautiques. A l'origine militaire, l'avion a été acquis en 2005 par l'Institut Royal des sciences Naturelles de Belgique afin de poursuivre la mission initiée en 1991 afin de répondre aux exigences initiées dans le cadre de l'Accord de Bonn. L'avion a toujours été dédicacé à la recherche des pollutions et à la poursuite des contrevants mais a élargi ses tâches d'observation en parallèle au développement de la Garde Côtière belge. De plus, le comptage des mammifères marins fait actuellement partie de ses missions régulières. Entièrement rééquippé en 2011, il dispose d'un SLAR Therma 9000, de caméras infra-rouge et vidéo et d'un système digital entièrement intégré combinant les données provernant des senseurs et le glass cockpit (Garmin G600) du côté pilotage.

Le Britten Norman Islander belge (Photo: DROITS RESERVES)