Le 22 septembre, le Baltic Dry Index a atteint un pic à 4651 points. Les conséquences sur les prix des matières premières se font déjà ressentir. Un article d'Hervé Deiss de Ports et Corridors
Les taux de fret des conteneurs ne cessent de croître depuis le début de l’année pour atteindre des niveaux jamais connus. Le vrac sec n’est pas en reste. Le Baltic Dry Index, qui mesure les taux de fret pour les navires de vracs secs, a atteint un pic à 4651 points. Les observateurs soulignent que ce niveau n’a pas été atteint depuis novembre 2009.
Croissance économique et relance de la demande
Les causes de cette hausse sont multiples. En premier lieu, la croissance économique a réactivé fortement la demande en navires pour l’acheminement des matières premières. Ensuite, la congestion portuaire pendant l’été à Ningbo, en Chine, a désorganisé les chaînes logistiques. Ce port du centre de la Chine joue un rôle important pour les importations de nombreux vracs dont le charbon. Aussi, les tensions diplomatiques entre la Chine et l’Australie modifient sensiblement les approvisionnements chinois.
Les tensions entre la Chine et l’Australie
En effet, la Chine s’est approvisionnée, pendant de nombreuses années, tant pour les minerais que pour les céréales ou le charbon sur le marché australien. Quand l’Australie a pris certaines positions diplomatiques concernant la Chine, tous les contrats commerciaux entre les deux pays ont été suspendus. La nouvelle alliance AUKUS entre Canberra, Washington et Londres n’a pas détendu les relations. Pour continuer d’alimenter leur économie, les acheteurs chinois se sont alors tournés vers d’autres origines pour les matières premières, notamment le Brésil pour les minerais, l’Europe pour les céréales ou encore la Colombie pour le charbon.
Changement de sourcing et allongement des transports
Ces changements de « sourcing » des acheteurs chinois a eu pour effet de rallonger les temps de transport. Pour les armateurs, cette nouvelle donne leur est profitable. Pour les affréteurs, l’ajout de tonnes/miles raréfie l’offre sur le marché.
Dans ces conditions, le coût des matières premières n’a eu de cesse de croître ces dernières semaines. En Chine, le prix de la tonne du charbon pour l’industrie sidérurgique a atteint un niveau élevé à plus de 400$. Cette augmentation est liée aux coûts logistiques, indiquent les observateurs de ce marché. En effet, la Chine achetait au préalable du charbon en Mongolie. Or, la crise sanitaire a joué sur ce flux. Les chauffeurs routiers ne peuvent approvisionner le pays en raison de cas de Covid-19.
Les nouveaux paradigmes du marché des vracs
En allant chercher son charbon auprès de nouveaux producteurs, notamment la Colombie, la Chine allonge le temps de transport. De plus, les autres producteurs sidérurgiques, l’Inde, la Corée, le Japon et l’Europe se tournent vers l’Australie pour s’approvisionner pour faire contrepoids au départ des Chinois. Ces modifications de logistique ont créé de nouveaux paradigmes dans le monde du vrac sec.
Ce qu’il se passe en ce moment sur le charbon et les minerais se décline aussi sur les céréales. L’arrivée de la Chine sur le marché céréalier européen a aussi allongé les temps de transport. Sur la campagne passée, la Chine a été parmi les premiers acheteurs de céréales en France.
Demain dépend de l’état de la croissance chinoise
Il est difficile de se projeter dans un avenir, même proche. Le nouvel équilibre entre l’offre et la demande ne s’équilibrera qu’avec la stabilité de la demande. Déjà, des journaux font état d’un tassement de la croissance de l’économie chinoise dans les prochaines semaines. Ce retour à une croissance modérée stabilisera le marché des vracs secs.
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