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Il pèse très lourd dans les charges d'exploitation des pêcheurs, qui n'ont aucune prise sur les fluctuations de son cours : le gazole, qui peut représenter un tiers du chiffre d’affaires d’un chalutier. Seule solution, trouver les moyens de consommer moins, sans amoindrir les capacités de pêche. Alors, depuis des décennies, on innove en matière de trains de pêche, de motorisation et de carène…

Un sujet crucial qui a bien entendu été abordé cette semaine, à l’occasion des Assises de la Pêche à Lorient. Nos confrères du Télégramme ont fait le point avec Patrick Cousin, directeur de la coopérative maritime de Lorient et technologiste des pêches aux Docks et entrepôts maritimes de Keroman.

 

 

Le TELEGRAMME : 80 % de la puissance consommée sur un bateau est liée au chalut et au gréement. Pourtant, ce n'est qu'assez récemment que l'innovation a commencé à porter sur les trains de pêche.

 

PATRICK COUSIN : Dans les années 80, on disposait d'une planche à dessin, d'un logiciel et d'un bassin d'essais. On n'avait pas la capacité de mesurer les tensions et tractions sur le train de pêche. Le seul objectif, c'était d'augmenter le pouvoir de capture. Tous les trois mois, on sortait de nouveaux chaluts. C'est à partir des années 2000, que les choses ont changé. Le baril de brut est passé à 30 dollars. Ça a rendu tout le monde beaucoup plus sensible aux consommations. Et nous disposions de nouveaux outils : des logiciels de simulation dynamique et des capteurs sur les engins de pêche. A l'époque, si les chalutiers évoluaient beaucoup, on s'intéressait peu à ce qui se passait sous l'eau. Aujourd'hui, grâce à l'instrumentation, on rattrape ce retard : le patron de pêche peut analyser en temps réel ce qui se passe dans le fond et s'adapter rapidement. Donc consommer moins

 

Ce type d'instrumentation coûte relativement cher. Et ce sont de nouvelles habitudes à prendre. Quel est le pourcentage de la flottille de pêche qui en est équipé ?

 

 

Un équipement complet coûte entre 35.000 et 50.000 €. Il est amorti en deux ou trois ans. Les premiers équipés ont été les pélagiques. Les autres y viennent petit à petit. Mais il en reste énormément à équiper. C'est tout l'enjeu du projet SOIP (Service d'optimisation et d'innovation pour chalutiers), lancé en 2013 par France Filière Pêche et auquel les Docks de Keroman sont associés. L'idée est de proposer aux armements à la pêche des optimisations grâce à des simulations numériques et des essais en mer. Des simulations sont actuellement réalisées sur une cinquantaine de navires répartis sur toutes les façades maritimes. Les résultats de ces études seront largement diffusés vers l'ensemble de la flottille.

 

 

Pile à hydrogène, moteur hybride, multicoque, étrave inversée... Les projets sont très nombreux à voir le jour. Où sont les principales possibilités de progression ?

 

 

Aujourd'hui, de l'équipementier à l'électronicien en passant par le mécanicien, tout le monde s'assoit autour de la table et travaille ensemble; c'est forcément source de progrès. Il n'y aura pas de révolution en matière de train de pêche. Tout au plus peut-on faire encore évoluer les matériaux et le pilotage. A mon sens, l'avenir est dans la motorisation. Prenez l'exemple de langoustiniers lorientais, qui ont réduit de 20 % leur consommation de gazole en instrumentant leur train de pêche. Pourtant, ils ne peuvent pas réduire davantage leur vitesse... Les moteurs s'encrassent. La dernière marge de progression, c'est la réglementation. Elle est inexistante le plus souvent en ce qui concerne toutes ces innovations. Ce sont les porteurs de projets qui sont obligés de la financer au fur et à mesure de l'avancée des projets.

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