Jeudi 9 juillet, une cérémonie a marqué au chantier iXblue de La Ciotat la jonction des deux moitiés de la coque en composite du futur Alfred Merlin, commandé par le ministère de la Culture pour son Département des Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines (DRASSM). Le navire, dont la construction a débuté à l’été 2019, doit être mis à l’eau à la toute fin de cette année en vue d’une livraison en mai 2021. Alors que le DRASSM pourrait quitter Marseille, où il n’a plus de place, pour s’installer à La Ciotat, a appris Mer et Marine, l’Alfred Merlin sera dans un premier temps basé en Méditerranée mais devrait ensuite être positionné à Saint-Malo, où les discussions avec les autorités bretonnes seraient en bonne voie pour permettre son accueil. Concernant l’armement de ce navire, mais aussi des deux autres unités du DRASSM, la Marine nationale, qui avait fourni l’équipage de l’ancien Archéonaute de 1967 à 1997, a décliné la proposition pour des questions de ressources humaines, comme nous l’indiquions en décembre dernier. Le ministère de la Culture est donc toujours à la recherche d’une solution, l’option en train de ce dessiner étant, selon nos informations, un accord avec l’Armement des Phares et Balises.

La cérémonie hier avec notamment Sébastien Grall, directeur du chantier iXblue, et au pupitre Michel L'Hour, directeur du DRASSM (© IMAGES EXPLORATIONS - FREDERIC OSADA)

Maquette de l'Alfred Merlin (© IMAGES EXPLORATIONS - FREDERIC OSADA)
Vidéo réalisée par le DRASSM de la jonction des deux demi-coques (© DRASSM)
Une unité hauturière pour compléter la flotte
Responsable du patrimoine sous-marin dans les eaux françaises, le DRASSM dispose aujourd’hui de deux navires récents, qui ont déjà été construits par iXblue : l’André Malraux (36 mètres) et le Triton (14.5 mètres), livrés par le chantier des Bouches-du-Rhône en 2012 et 2016. L’Alfred Merlin va permettre de compléter cette petite flotte pour réaliser un nombre plus important de missions, tout en disposant enfin d’un navire réellement hauturier. Une plate-forme multifonctions taillée pour des projections lointaines, en particulier vers les territoires d’Outre-mer où les besoins en matière de fouilles archéologiques sous-marines sont importants. Il sera doté de nombreux équipements hydro-océanographiques et de recherche archéologique, dont le nouveau robot Arthur développé par le DRASSM en association avec le LIRMM de Montpellier, un engin qui pourra plonger jusqu’à 2500 mètres de profondeur.
Un projet majeur pour iXblue dans les grandes plateformes en composite
Long de 46 mètres pour une largeur de 10.8 mètres et un déplacement prévu pour atteindre près de 420 tonnes à pleine charge, l’Alfred Merlin, conçu avec les architectes de Mauric, a été développé dans le cadre de NESSIE (Novel Efficient Survey Ship InitiativE), un projet innovant avec une coque adoptant un design semi-SWATH (Small Waterplane Area Twin Hull) et dotée de capteurs pour étudier le comportement et le vieillissement d’une grande plateforme en composite. Car l’Alfred Merlin sera l’un des plus grands navires en composite en service dans le monde et un projet très important pour iXblue, engagé notamment dans le projet européen Fibreship pour démontrer la possibilité de réaliser des bateaux de plus de 50 mètres et 500 UMS de jauge en matériaux composites, ce que la règlementation interdit aujourd’hui. « Pour nous c’est une nouvelle étape vers les navires en composite de plus de 500 UMS. L’Alfred Merlin bénéficie de toutes les technologies que nous avons développées au fil des années sur les structures composites, par exemple autour des moules en infusion pour réduire les coûts et les délais. Cette coque a d’ailleurs été produite avec le plus grand moule que nous avons fabriqué à ce jour. Il y a également eu des développements spécifiques à ce projet, par exemple sur le portique de lavage, extrêmement léger puisqu’en carbone. Cela contribue encore à réduire le poids du navire, qui sera deux fois moins lourd au moins qu’un bateau en acier, permettant de réaliser des économies d’énergie considérables et aussi d’obtenir des gains importants sur la capacité d’emport. C’est dans cette optique aussi que le navire dispose de réservoirs en composite intégrés à la structure, offrant un gros gain en matière d’espace et de volume. Un travail important a été fait sur l’ergonome et puis il y a la forme très particulière que Mauric appelle semi-SWATH, pour laquelle les essais en bassin ont démontré des performances assez extraordinaires en matière de stabilité à très faible vitesse ou à l’arrêt. Pour nous, c’est un donc un navire qui va faire date, et qui je pense constitue la quintessence de ce que l’on peut imaginer en matière d’unité de recherche de moins de 500 UMS », explique à Mer et Marine Sébastien Grall, directeur du chantier iXblue de La Ciotat.
Vedette à propulsion hydrogène et jumboisation de thoniers
L’entreprise, qui compte 75 personnes, attend donc avec impatience la mise à l’eau du nouveau fleuron du DRASSM et ses essais, afin de valider à la mer les performances escomptées. En attendant, le constructeur travaille sur d’autres projets, dont une vedette de plaisance de 12 mètres à propulsion hydrogène (marque Hynova) ou encore la jumboisation de deux thoniers de l’armement sétois Avalon, qui vont voir leur longueur passer de 43 à 46 mètres grâce à l’ajout d’un nouveau tronçon. Les moules sont en cours de fabrication.

Le drone de surface DriX (© iXblue)
L’essor se confirme dans les drones de surface
Le chantier a également une belle activité dans le domaine des drones de surface, développés avec les autres entités d’iXblue, comme le DriX et d’autres modèles. « Nous avons une grosse activité dans les engins autonomes, qui représentent maintenant une part importante de notre plan de charge, avec des drones de surface et des systèmes de récupération à la mer. Nous en avons en construction, en essais et d’autres en développement ». Et iXblue continue de discuter sur de nouveaux projets en construction de navires, notamment autour des catamarans de travail.
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